Le malouf, l'un des genres musicaux les plus majestueux, les plus captivants par essence trouve, un peu plus, son sens profond, sa nature quasi mystique, sa nostalgie des jardins perdus d'Andalousie, chez le mélomane éperdu dans sa quête de perfection. C'est le sentiment rare, où se mêlent à la fois allégresse et douce mélancolie, qui nous submerge en écoutant le dernier album de Amine Khettat, «Machamim», ou «Senteurs constantinoises», sorti en juillet 2013, composé de deux parties : Nûba zidane, englobant mçaddar, btayhi, khlass, dans la pure tradition classique, et Rhaoui, aérien, allègre, introduisant, entre autres, des morceaux culte, «Ya dhaou ayani» et «Bilah ya ben el werchene». Comment ne pas avoir le malouf dans le sang, quand on en a été bercé depuis la naissance, et surtout quand on est le fils de Rabah Khettat, ce maestro hors pair, cet amoureux de la musique de chambre, qui dirigea de nombreux orchestres locaux! Mais encore, quand on a été le disciple de feu le grand Lotfi Amirèche ! A 29 ans, Amine a trouvé sa voie, après avoir fait partie pendant des années, de Maqam, d'El Bestandjia, de l'orchestre régional et national, joué du violon, du luth et de la flûte en virtuose, et accompagné de grands chanteurs nationaux. C'est à Paris, où il a effectué son doctorat en informatique industrielle (il enseigne actuellement à l'université Paris Sud), qu'il commence sa carrière de chanteur solo avec un ensemble de six musiciens. Il s'y produira plusieurs fois, notamment à l'institut du monde arabe et au centre culturel algérien. Ce jeune prodige constantinois, raffiné, esthète jusqu'au bout des ongles, affirme ne pas du tout craindre la déperdition, à Constantine, de ce magnifique patrimoine séculaire qu'est le malouf. Optimiste, il déclare : « C'est un genre qui est sauvegardé dans cette ville car très prisé aussi bien par les jeunes que par les aînés, dont beaucoup ont une remarquable connaissance des textes classiques chantés, il n'y a qu'à voir la prolifération des orchestres et des associations de malouf, et c'est vraiment encourageant.» Prenant le taureau par les cornes, il se lance, d'ores et déjà, à la conquête du public algérien. Son prochain concert sera organisé le 10 octobre courant à la salle El Mougar d'Alger. Une autre soirée est programmée au centre culturel algérien, à Paris, le 30 novembre prochain, en hommage à la mémoire de feu Brahim El Amouchi. Un geste grandiose qui honore son initiateur!