L'ouverture d'une nouvelle officine au quartier Beau séjour à Batna est l'objet de toutes les controverses, tant les soupçons sur la légalité de la procédure sont omniprésents. En effet, que se soit les diplômés en pharmacie inscrits sur la liste d'attente pour l'obtention d'agrément ou les pharmaciens déjà en exercice, tous s'interrogent sur l'octroi par la direction de la santé et de la population (DSP) à une jeune diplômée un agrément d'ouverture d'une officine en plein centre-ville et, de surcroît, à son adresse de résidence. Le syndicat national algérien des pharmaciens d'officine (SNAPO), dans une demande d'explication adressée à la DSP, datée du 31 juillet dernier et dont nous détenons une copie, affirme que la réglementation en vigueur pour l'ouverture d'une pharmacie n'a pas été respectée et ce, en deux points : «Premièrement, le classement de la pharmacienne dans la liste de la commune de Batna ne lui permet pas d'avoir la priorité. Ce qui constitue un déni de droit aux pharmaciens en chômage classés avant elle. Deuxièmement, la zone choisie pour l'ouverture de l'officine ne peut être classée comme zone enclavée dont parle le décret ministériel 03-05, et qui a pour but de couvrir des zones habitées loin du centre-ville et qui ne disposent d'aucune pharmacie. Le cas échéant de la pharmacie de Meriem Ben Boulaid ne correspond nullement à cette description». En outre, S. Boumaâraf, président du bureau de wilaya du SNAPO, explique qu'aux yeux du syndicat, cette pharmacie, qui a ouvert ses portes la première semaine du mois de septembre, est dans «l'illégalité». «Ça fait plus d'un mois, délai réglementaire pour une réponse administrative, qu'on attend l'explication du DSP, mais elle n'est toujours pas arrivée. Si une explication légale existe, nous sommes en droit de la connaître, sinon on fera tout pour fermer cette officine», dixit S. Boumaâraf. Selon une source bien informée, la pharmacienne concernée a pu obtenir un agrément suite à une «lettre administrative» émanant du précédent ministre de la Santé, qui recommanderait l'accord du DSP pour l'obtention d'un agrément. Or, selon le représentant du SNAPO, le ministre a le droit d'accorder des dérogations mais uniquement sur une base légale. «Si les raisons évoquées dépassent notre compétence locale, le syndicat au niveau d'Alger prendra le relais», nous affirme notre interlocuteur. Par ailleurs, le nouveau directeur de la santé et de la population, quant à lui, affirme qu'il n'est pas au courant de la situation et n'a pas souhaité s'étendre sur le sujet, le classant parmi le passif de la DSP de Batna. Or, l'on est tenté de croire l'inverse, puisque le courrier du SNAPO, note-on, remonte à plus d'un mois. La pharmacie se trouve aussi à une cinquantaine de mètres du siège de la DSP, ce qui la rend extrêmement visible. Le dossier de l'officine «Ben Boulaid» est perçu, par l'ensemble des personnes interrogées comme étant sensible ! Les privilèges liés à «la légitimité historique», dans ce cas doublement héritée, refont surface et risquent de perturber le bon déroulement du processus d'accord d'agrément. Maintes fois, les responsables du secteur de la santé ont crié à la saturation de la ville de Batna quant au nombre de pharmacies. La ville de Batna compte plus de 60 pharmacies en plus de ce que le numerus clausus permet. Il serait donc insensé d'utiliser l'ouverture de cette pharmacie comme alibi pour débloquer des dizaines d'autres postes, comme le veut la tradition.