Programmé pour le 14 octobre prochain, le renouvellement partiel des membres du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) a été renvoyé au 24. Six membres de cette haute institution viennent d'achever leur mandat de quatre ans ; deux devront être désignés par le président de la République, alors que quatre autres – représentant les juges du siège, les procureurs, le Conseil d'Etat et la Cour suprême – doivent être élus par leurs pairs. Toutes les conditions de préparation étaient réunies et les candidats avaient même entamé leur campagne électorale avant que la décision de reporter le scrutin de dix jours ne soit annoncée. Certaines sources judiciaires expliquent cet ajournement par le fait que la date du 14 octobre coïncide avec la veille de la fête de l'Aïd El Adha. En outre, nos interlocuteurs se demandent quel sort connaîtra le mouvement dans les rangs de la magistrature préparé par l'ex-ministre Mohamed Charfi, resté sur le bureau de son successeur, Tayeb Louh. On sait déjà, nous dit-on, que «la mouture» n'est plus la même. «Elle a été travaillée pour réduire considérablement le nombre de magistrats concernés par les changements», expliquent nos sources. Mais «le devenir de ce travail reste inconnu», disent-elles. Aucun mouvement des magistrats En effet, si l'on se réfère aux déclarations du ministre de la Justice, Tayeb Louh, le mouvement des magistrats n'est vraiment pas à l'ordre du jour. Intervenant en marge des travaux du Conseil de la nation, M. Louh avait clairement affirmé : «Pour le moment, aucun mouvement dans le corps de la magistrature n'est à l'ordre du jour.» Pour de nombreux juges, en cette période précise, il ne peut y avoir un quelconque changement. «Le ministre ne peut opérer de changement dans les rangs pour deux raisons. La première est liée à la révision de la liste électorale en cours. Il est pratiquement impossible de faire bouger les magistrats qui président les commissions chargées de revoir le fichier électoral. Sinon, cela pourrait être interprété comme une volonté délibérée de perturber l'opération de révision. La seconde raison relève du fait que nous sommes déjà en pleine année sociale, judiciaire et scolaire. Faire bouger un magistrat sans prendre en considération les contraintes liées à la scolarisation des enfants, à l'éloignement familial, etc., va avoir de lourdes incidences sur le fonctionnement judiciaire», notent nos sources, qui précisent que cette situation est le résultat du retard enregistré dans l'examen du dossier par le président de la République en juin/juillet. De ce fait, toutes les décisions relatives aux fonctions judiciaires ont, elles aussi, été remises aux calendes grecques. Cette année, toujours en raison de la maladie du Président, le coup d'envoi pour l'ouverture de l'année judiciaire s'est fait en coulisses et, dans de nombreux cas, sans respecter le décret présidentiel (n°66-172 du 13 juin 1996 relatif aux vacances judiciaires annuelles et au service de vacation des juridictions) qui fixe la date d'ouverture au 20 septembre de chaque année. à quand l'ouverture de l'année judiciaire ? Ce décret, faut-il le préciser, arrête les vacances judiciaires de la Cour suprême du 15 juillet au 15 septembre et stipule dans son article 6 que «l'audience solennelle de la rentrée de la Cour suprême est fixée au 20 septembre. Dans le cas où le 20 septembre est un jour de repos hebdomadaire ou un jour férié, elle est tenue, le premier jour ouvrable qui suit». Dans son chapitre II, il est précisé que pour les tribunaux et les cours, la date d'ouverture de l'année judiciaire est fixée au 22 septembre, soit deux jours ouvrables après celle de la Cour suprême. Et c'est au ministre de la Justice de veiller à l'exécution de ces dispositions qui, depuis plus d'une dizaine d'années, sont totalement ignorées. La tradition qui veut que ce soit le président de la République, en tant que premier magistrat du pays, qui préside la cérémonie a fini par prendre le dessus sur la loi. L'année dernière, magistrats et avocats avaient attendu des mois l'invitation de la Présidence à la Cour suprême, en vain, suscitant ainsi un retard considérable dans la répartition des tâches et la programmation des audiences au niveau des juridictions. Une situation que déplorent de nombreux magistrats avec lesquels nous nous sommes entretenus. Pour eux, «depuis la maladie du Président, l'appareil judiciaire est au point mort». Piètre image que donne le secteur et qui reflète celle de tout le pays…