Tirs croisés entre Alger et Rabat. La tension diplomatique se réinstalle entre les deux pays. M. Lamamra déplore, en termes forts, les attaques du makhzen et de ses relais politico-médiatiques. Dans son message, Bouteflika a défendu «la nécessité de la mise en place d'un mécanisme de suivi et de surveillance des droits de l'homme au Sahara occidental», réaffirmant que «l'Algérie demeure à cet égard convaincue que l'élargissement de la mission de la Minurso à la prise en charge par les Nations unies de la surveillance des droits de l'homme au Sahara occidental est une nécessité». Plus offensif encore, le chef de l'Etat a jugé que «les violations massives et systématiques des droits de l'homme, qui ont lieu à l'intérieur des territoires occupés pour réprimer la lutte pacifique des citoyens pour la liberté d'association, de manifestation et d'expression, ne sauraient laisser la communauté internationale indifférente». Cette déclaration a piqué au vif le palais royal qui a répliqué via son canal officiel, Maghreb agence presse (MAP), qui s'est fendu d'un virulent communiqué qualifiant le discours du président Bouteflika de «provocateur contre le Maroc qui révèle le vrai visage de la politique hostile de l'Algérie à l'égard du Maroc», peut-on y lire. L'agence marocaine reproche au président algérien son soutien à la cause sahraouie. Le discours de Bouteflika est «provocateur parce qu'il affirme clairement son soutien au Front Polisario et estime que le conflit sahraoui ne peut trouver sa solution que dans le cadre de l'application de la résolution 1514 de l'Assemblée générale de l'ONU», écrit encore la MAP. Cette dernière a été vite rappelée à l'ordre par le chef de la diplomatie algérienne, Ramtane Lamamra, qui a qualifié cette attaque médiatique menée par l'agence de presse marocaine d'«irresponsable» et d'«inadmissible», en appelant les «frères marocains à la retenue». Le ministre algérien des Affaires étrangères a estimé que le discours prononcé à Abuja au nom du président de la République par le ministre de la Justice «est un rappel de la position bien connue de l'Algérie sur l'exigence du respect des droits de l'homme au Sahara occidental à travers la mise en place d'un mécanisme (international) de suivi et de surveillance». Ramtane Lamamra, qui intervenait, hier à Alger, à l'occasion d'une conférence de presse conjointe avec son homologue colombienne, Maria Angela Holguin, a haussé le ton en sommant les autorités marocaines d'en finir avec les positions «inadmissibles» et «irresponsables». «Cela (le discours du président de la République) semble avoir suscité une réaction de la part de l'agence de presse officielle du royaume marocain. Je continuerai à m'en tenir à la retenue ; néanmoins, je dois dire que cet incident ainsi que les déclarations faites par un chef de parti politique marocain (l'Istiqlal), ouvertement et outrancièrement expansionnistes, sont absolument inadmissibles et irresponsables», a-t-il martelé. Il faut rappeler que depuis quelque temps, le parti Istiqlal que dirige Hamid Chabat ne cesse de réclamer la marocanité de Tindouf. Une revendication farfelue qui n'est pas sans incidence sur les rapports entre l'Algérie et le Maroc. M. Lamamra déplore, en termes forts, les attaques du makhzen et de ses relais politico-médiatiques. «Le 8 octobre dernier, à l'occasion de la Journée de la diplomatie algérienne, j'avais appelé nos frères marocains à la retenue et j'avais indiqué que, pour notre part, nous allions observer cette retenue. Depuis lors, malheureusement, nous n'avons pas eu beaucoup de démonstrations de retenue», a regretté le chef de la diplomatie algérienne. Menaçant, Ramtane Lamamra a dit espérer qu'«une conclusion sera tirée et que ces deux positions inadmissibles et irresponsables seront les dernières du genre que nous entendrons».