Des centaines de manifestants se sont attaqués dans la nuit de jeudi dernier à un bar situé au centre-ville de Azzaba. Résultat de la révolte ; le bar a été carrément vidé, un citoyen grièvement blessé, et une grande rancœur persistait hier encore chez les jeunes Azzabis. Selon des témoignages recueillis sur place, la colère aurait été motivée par les agissements des clients du bar situé dans un des plus grands quartiers populaires de Azzaba, la rue d'Alger en l'occurrence. Les jeunes du quartier, appuyés par des personnes âgées, racontent que ce bar serait devenu un haut lieu de tapage et incommodait les habitants dont les demeures se trouvent à moins de 10 m seulement. « Dès l'ouverture de ce bar à 10 h, cette rue devenait impraticable et la population l'évitait de peur de se retrouver dans des situations déplaisantes », raconte un habitant du quartier. Quant aux raisons directes de cette colère, les jeunes racontent : « Il était environ 22 h quand une bagarre a éclaté entre les clients du bar, aussitôt des tessons de bouteille ont commencé à pleuvoir sur nos têtes sans parler des obscénités qu'on entendait nettement à la faveur de la nuit. Attirés par le vacarme, les jeunes du quartier se sont regroupés et ont tenté de forcer la porte d'entrée. Nous ne nous sommes attaqués à aucun client, on est monté au bar pour vider toute la boisson qui s'y trouvait. Ce n'est que vers minuit que nous avons regagné nos demeures pour revenir le lendemain nettoyer tous les débris que nous avons occasionnés aussi bien à l'intérieur du bar qu'aux alentours. » Les policiers qui s'étaient déplacés sur les lieux n'ont, aux dires des manifestants, molesté personne, chose que confirme le commissaire de la sûreté de daïra de Azzaba, qui a rapporté hier : « A ce jour, nous n'avons enregistré aucune plainte. » Quant aux circonstances réelles de la blessure du citoyen transféré la nuit même de l'hôpital de Azzaba vers le CHU de Annaba elles restent encore à déterminer. Au moment où le commissaire de la sûreté de daïra de Azzaba a tenu à préciser hier : « Je le redis encore, on n'a enregistré aucun blessé. » Au sujet du nombre de manifestants, les riverains estimaient qu'il y avait plus de 2000 personnes. Le commissaire par contre dit qu'ils n'auraient été que « quelques dizaines », en confirmant par ailleurs que cette colère s'était déclenchée suite à une bagarre entre clients, qui a été relayée par la suite par les habitants du quartier. Ce bar situé au premier étage d'un hôtel désaffecté (hôtel Messous) a déjà fait l'objet d'un premier arrêté de fermeture de six mois en 2003 après qu'un crime eut lieu dans son enceinte. Au sujet d'éventuelles manipulations et comme le fait de lier chaque événement un « starter » est devenu une habitude bien algérienne, beaucoup de supputations sont avancées ça et là. L'intérêt de certains clans locaux dans une Azzaba en pleine mutation revient avec insistance, alors que d'autres tentent même d'avancer le volet religieux. Les jeunes, une vingtaine, qui ont pris part aux manifestations, et accepté d'apporter leur témoignage, ne portaient cependant aucun signe qu'on aurait tendance à imputer à un courant quelconque. Ils ressemblaient à tous les jeunes Algériens désœuvrés et tenaient un langage amère, dicté beaucoup plus par les aléas de la vie de tous les jours que par un « prêche ». Et s'il y a une conclusion à tirer des événements qui ont secoué Azzaba, elle devrait être en relation avec l'absence d'écoute des populations et la faillite de la société civile. D'après les déclaration faits hier par le premier ressponsable de la sûreté de Azzaba le bar devrait certainement faire l'objet d'un arrêté de fermeture. Une finalité qui aurait pu être retenue sans casse et sans émeutes si seulement elle avait été représentée et défendue dans un cadre associatif qui aurait aussi impliqué les élus locaux à qui revient la charge de gérer les affaires de la cité.