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El Watan Week-end vous fait découvrir le rôle incontournable des chauves-souris. Les chauves-souris d'Algérie en grand danger On ne les aime pas, elles nous font même peur. Pourtant, elles passent toutes les nuits à nettoyer la planète.
«Faux et archi-faux», s'insurgent les spécialistes des chauves-souris contre les légendes moyenâgeuses encore colportées de nos jours sur les maléfices et l'agressivité de ces volatiles trop peu connus. Comme leurs semblables européennes, les 25 espèces de chauves-souris d'Algérie ne s'attaquent jamais à l'homme ni à ses animaux domestiques, pour la bonne et simple raison qu'elles sont exclusivement insectivores. Elles ne se nourrissent que d'insectes et c'est ce qui, précisément, les rend utiles à l'homme et indispensables à l'équilibre des écosystèmes naturels. Et même si, comme tous les animaux, elles peuvent être porteuses de germes infectieux, on connaît très peu de cas de transmission à l'homme. Il y a 1200 espèces de chauves-souris dont le nom scientifique est chiroptères ou «mammifère volant», car c'est un animal qui allaite son unique petit. Il est rare, en effet, que la chauve-souris donne plus d'un petit par an. C'est l'ordre des mammifères le plus important après celui des rongeurs. Les chiroptères sont souvent associés aux cétacés (mammifères marins), parce qu'ils se déplacent aussi par écholocation, c'est-à-dire comme s'ils avaient un sonar. Ils émettent des ultrasons sous forme de cris très aigus inaudibles à notre oreille qui, lorsqu'ils rebondissent sur un obstacle ou une proie, reviennent sous la forme d'écho. Ils hibernent dans leurs gîtes, la tête en bas accrochés aux parois par de puissantes griffes. On connaît encore très mal les chauves-souris, car ce sont des animaux difficiles à observer et à suivre. Nectar Elles sont nocturnes et vivent dans des endroits retirés, sombres, enfouis, au fond des grottes et autres anfractuosités. On comprend alors la peur profonde de l'homme à leur égard. Elles sont les principaux prédateurs des insectes qui volent la nuit comme les moustiques, mais également, et on le sait moins, les espèces nuisibles pour l'agriculture et les forêts qui provoquent des pertes qui se soldent en milliards de dollars. Les grandes chauves-souris, les mégachiroptères, inexistantes chez nous et qu'on oppose aux petites, les microchiroptères, se nourrissent de graines et de nectar et elles jouent, bien entendu, un rôle dans la reproduction et la dissémination des plantes, notamment pour l'extension des forêts tropicales où elles vivent accrochées aux arbres. En Algérie, nous avons 25 espèces de chauves-souris toutes insectivores et de petite taille. La plus grande d'entre elles, le grand rhinolophe (Rhinolophus ferrumequinum), a un corps de 10 cm et une envergure de 35 cm, alors que la plus petite, la pipistrelle (Pipistrellus), fait à peine 6 cm de long pour une envergure de 10 cm. Si ces mammifères peuvent voler, c'est grâce à une spécialisation très poussée qui est également leur vulnérabilité : le patagium, la membrane alaire entre les doigts qui sont d'une longueur démesurée. Ce repli membranaire s'étend également entre les membres postérieurs munis de puissantes griffes que ces animaux utilisent pour se suspendre tête en bas au plafond de leur gîte. Les chauves-souris sont recouvertes d'une douce fourrure soyeuse. Déclin Elles ont de petits yeux, mais sont aveugles, et de grandes oreilles pour réceptionner les ondes réfléchies de leurs cris. Leur hibernation en Algérie est plus courte qu'en Europe, et elles peuvent vivre jusqu'à 25 ans. Elles sont surtout présentes dans la bande littorale du pays où on compte 17 sur les 25 espèces. On en trouve autant dans l'Atlas tellien avec cependant des effectifs plus réduits. Plus au sud, dans l'Atlas saharien, elles ne sont plus que 13 espèces à zébrer le ciel crépusculaire. Sur les Hauts-Plateaux, la steppe et le désert, on ne rencontre plus qu'une dizaine d'espèces. Les espèces qui vivent en Algérie sont un véritable insecticide naturel. Elles régulent les populations d'insectes qui s'attaquent aux céréales et à la sylviculture. Les forestiers savent depuis toujours qu'avec les chauves-souris, ils disposent de précieuses alliées pour la conservation et la gestion des massifs forestiers. Ainsi, chaque nuit, des centaines de tonnes d'insectes nuisibles sont éliminés de la planète. Ce que ne pourrait remplacer aucun insecticide sans menacer gravement l'environnement et la santé. Et ce serait tout autant de tonnes d'insecticides en moins qu'il aurait fallu employer avec les surcoûts que cela induit. Mais au moment où l'on prend conscience des énormes bénéfices apportés par les chiroptères - l'année 2012 a été déclarée année internationale des chauves-souris par le Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE) pour rappeler ses nombreux services –, on constate aussi un inquiétant déclin des populations dont les raisons sont toutes liées directement ou indirectement aux activités humaines. Pollution La principale et la plus décriée est l'utilisation immodérée des pesticides qui raréfie et banalise la faune des insectes sans lesquels la chauve-souris ne peut survivre. L'exposition à de nombreux polluants et substances chimiques affecte aussi l'immunité de ces petits animaux très vulnérables et provoque chez eux des épizooties comme le «syndrome du nez blanc» aux USA et plus près de nous, en Europe, des affections par coronavirus. Autre cause de la disparition des chauves-souris : la fragmentation des écosystèmes avec la destruction des territoires sauvages par les infrastructures où l'assèchement des zones humides. Les infrastructures et l'urbanisme font disparaître les gîtes de reproduction des chauves-souris que sont les cavités souterraines, les caves, les combles des vieux bâtis et, de plus en plus, l'exploration sans précaution préalable des grottes et autres curiosités spéléologique ouvertes au tourisme de masse. Autre raison invoquée de la disparition, la pollution lumineuse provoquée par les nuits constamment illuminées dans ou à proximité des agglomérations. Les causes de la disparition des chiroptères sont multiples, mais elles semblent s'expliquer aussi par les exigences écologiques strictes de l'espèce en termes d'habitat. En effet, une population de chiroptères ne peut se maintenir durablement dans une région que si cette dernière offre un réseau cohérent de terrains de chasse riches en proies et en gîtes d'hivernage, reliés par des couloirs de circulation, c'est-à-dire sans aucune interruption physique.