La ville de Genève accueillera demain, jeudi 8 juin, une importante rencontre-débat intitulée « Les libertés syndicales et la construction démocratique en Algérie ». Organisée par la Commission socialiste de solidarité internationale, avec le soutien du Parti socialiste genevois et du Front des forces socialistes algérien, la conférence-débat sera animée par une pléiade d'intervenants aussi bien algériens qu'étrangers. Tout au long de quatre heures et demie, le débat - qui se déroulera de 18h30 à 23h (heure locale) à l'Université ouvrière de Genève - portera essentiellement sur la situation actuelle du syndicalisme algérien avec un regard critique sur la répression politique qui s'est abattue sur les syndicats autonomes. Il sera aussi question de l'histoire du syndicalisme algérien. Il est prévu que le débat soit animé, entre autres, par des représentants du mouvement syndical autonome, tels Rachid Malaoui, président du Syndicat national autonome du personnel de l'administration publique (SNAPAP), Yamina Maghraoui, représentante du Comité national des femmes du SNAPAP, Mohamed Hadj Djilani, représentant des syndicats des vétérinaires et des enseignants du paramédical, et Salim Oulha, représentant du Conseil national autonome des professeurs de l'enseignement secondaire et technique. Cette rencontre sera rehaussée par la présence de trois éminentes personnalités qui auront à aborder la situation du mouvement syndical algérien aujourd'hui, mais qui devraient également passer en revue l'histoire du syndicalisme algérien pendant la lutte pour la Libération nationale. Il s'agit bien de Hocine Aït Ahmed, président du FFS, Mohammed Harbi, historien du mouvement national algérien, et de Dan Gallin, président de la fondation Global Labour Institute, spécialisée dans la recherche sur les mouvements syndicaux dans le monde. M. Gallin tentera d'expliquer à travers sa communication comment a-t-on brisé le premier syndicat autonome en Algérie, et ce, pendant la guerre de l'Indépendance ? En effet, l'Union syndicale des travailleurs algériens, créée le 14 février 1956 par des syndicalistes du Mouvement national algérien dirigé par Messali Hadj, a été « étouffée » par la machine du FLN, en créant quelques semaines plus tard l'Union générale des travailleurs algériens, qui demeure jusqu'à maintenant l'unique syndicat reconnu par les autorités du pays. Dans un document d'une cinquantaine de pages, les participants à cette conférence-débat ont fait un état des lieux. Ainsi, écrivent-ils, le front social se trouve en pleine et constante ébullition, alors que le « front politique est en état de glaciation ». Tout en mettant en exergue la chasse aux sorcières menée par les autorités contre les représentants des syndicats autonomes, porte-voix des centaines de milliers de travailleurs en mal de leur quotidien, ils ont souligné la montée en puissance de la contestation dans différents secteurs d'activités, notamment dans l'éducation, l'enseignement supérieur, la santé et la fonction publique qui compte environ 1 300 000 employés. La situation matérielle, les conditions de travail, la dégradation du pouvoir d'achat des salariés sont autant de facteurs qui ont mis le front social en ébullition, est-il mentionné dans le document. Les travailleurs ont exprimé et continuent toujours à le faire (dans le secteur de l'enseignement supérieur) par des grèves cycliques, paralysant écoles, hôpitaux et universités. Qualifiant la situation des salariés algériens de « calamiteuse », les rédacteurs de ce document précisent que le salaire national minimum garanti (SNMG), qui est de 10 000 DA ( soit à peu près 100 euros), arrive à peine à couvrir « la moitié des besoins minimaux d'une famille de cinq personnes ». « Ce même SNMG, relève-t-on encore, est inférieur ‘‘d'un tiers'' au SNMG tunisien (150 euros) et de la moitié au SNMG marocain (200 euros), alors que le produit intérieur brut par habitant est supérieur en Algérie (3000 dollars US/an) à celui de ses deux voisins (2600 $ us en Tunisie et 2000 $ US au Maroc). » En dépit d'une aisance financière, les autorités algériennes hésitent à satisfaire les revendications salariales des travailleurs. De ce fait, indique-t-on dans le document, un professeur de lycée, qui jouit d'une dizaine d'années d'expérience, perçoit un revenu mensuel inférieur ou égal à celui d'un éboueur en Suisse ou partout ailleurs.