Abou Moussaâb Al Zarqaoui, le chef d'Al Qaîda en Irak, n'est plus ce leader invisible, ou même qui n'aurait jamais existé selon des dirigeants sunnites irakiens. Lui et l'un des principaux chefs de la guérilla ont été tués, mercredi, dans un raid aérien au nord de Baghdad. C'est le président américain, George W. Bush, qui a annoncé cette victoire. Mais, apparemment, Bush a le succès bien modeste, comme s'il était convaincu que la violence ne s'arrêtera pas en Irak pour avoir pris des proportions qui ne sont pas celles d'un homme seul. En ce sens, beaucoup reste à faire de l'aveu même des Etats-Unis. Signe de la persistance des craintes de violences, Washington a dit que la mort de Zarqaoui n'aurait pas d'incidence immédiate sur le nombre de GI's déployés en Irak, et qu'une telle décision dépendrait des conditions sur le terrain, où 35 personnes ont encore péri dans quatre attentats à Baghdad. Al Qaïda s'est d'ailleurs engagée à poursuivre le combat contre les forces américaines, dans un communiqué confirmant la mort de ce Jordanien, dont le groupe est responsable d'attentats meurtriers, de rapts et d'assassinats et qui avait déclaré la guerre aux chiites en Irak. « Zarqaoui a été éliminé », a proclamé, dans une conférence de presse à Baghdad le Premier ministre irakien, Nouri Al Maliki, sur un ton triomphal, suscitant les applaudissements de l'assistance. « Ce qui s'est passé aujourd'hui est le résultat de la coopération du peuple irakien, qui a facilité une opération combinée des forces de police et de la force multinationale », dirigée par les Américains, a-t-il dit. La mort de Zarqaoui, dont la tête avait été mise à prix pour 25 millions de dollars par Washington, est le plus important revers subi par les forces hostiles à la présence des troupes américaines en Irak depuis la capture du président déchu, Saddam Hussein, en décembre 2003. Selon le commandant de la Force multinationale en Irak, le général américain George Casey, l'ennemi public numéro un en Irak, « a été tué dans un raid aérien contre un repaire isolé à 8 km au nord de Baâqouba (60 km au nord de Baghdad) mercredi ». « Le raid a été mené après des renseignements obtenus de hauts responsables de son groupe, selon lesquels il allait participer à une réunion à quelque 8 km au nord de Baâqouba. L'un de ses lieutenants les plus importants, son conseiller religieux cheikh Abdel Rahman, a été tué avec lui », a-t-il dit. « Des unités de la police irakienne sont arrivées les premières sur place. Des troupes de la coalition ont ensuite identifié Zarqaoui grâce à ses empreintes digitales, son visage et ses cicatrices », a-t-il expliqué. L'armée américaine a présenté aux journalistes une photographie montrant le visage en noir et blanc de Zarqaoui, 39 ans, les yeux fermés avec une barbe fournie. Elle a montré des photos du raid dans lequel les renseignements jordaniens ont été impliqués, selon Amman. Selon le porte-parole de l'armée américaine, le général William Caldwell, la piste de Zarqaoui avait été remontée notamment par le biais de la surveillance de Rahman, le « conseiller spirituel ». Rahman « nous a été signalé par quelqu'un qui appartient au réseau de Zarqaoui », a-t-il précisé, tout en indiquant que l'Egyptien Abou Al Masri pourrait succéder à Zarqaoui. C'est donc tout juste une bataille qui vient d'être remportée, et celle-ci, admet-on, ne peut refermer la boîte de Pandore.