Plus de 1300 travailleurs d'une importante entreprise publique risquent de se retrouver au chômage à cause «de l'absence d'un plan de charge et la poursuite de la politique du bradage des outils de la production nationale». Il s'agit des employés de la société de construction de structures métalliques et industrielles (Baticim) qui ont observé un arrêt de travail hier dans plusieurs unités à travers le pays pour dénoncer «l'octroi par Cameg, une filiale de Sonelgaz, d'un marché de 25 milliards de dinars environ portant acquisition de pylônes électriques à une entreprise étrangère alors que la leur est leader dans le domaine en Algérie». L 'affaire risque de prendre l'allure d'un véritable scandale d'autant plus que certaines clauses du cahier des charges établi par Cameg ne permettent à aucune entreprise nationale d'y soumissionner. A Rouiba, plus de 250 ouvriers de cette société ont bloqué, hier vers 11h, la route de la zone industrielle pour réclamer la préservation de leurs emplois et l'application des directives du gouvernement en vue de préserver les entreprises publiques. Les protestataires, portant des tenues bleues, ont brandi plusieurs banderoles sur lesquelles on pouvait lire entre autres : «Non à l'importation de pylônes électriques au détriment de la production nationale» ; «N'hypothéquez pas l'avenir de nos enfants !» ; «On est en chômage technique»… Certains affirment que «Baticim est le premier et meilleur fabricant de pylônes électriques dans le pays», en rappelant qu'«il a obtenu deux certificats ISO, 14001 et 9001, pour le respect des normes internationales». Présent à la manifestation, le secrétaire général de l'union locale de l'UGTA, M. Messaoudi, n'a pas mâché ses mots à l'égard des responsables du gouvernement. «On ne sait plus qui décide dans ce pays. On dirait qu'on a un Etat dans l'Etat», s'est-il indigné. Pour lui, le marché devait normalement être octroyé de gré à gré à Baticim. Très inquiets sur l'avenir de leur entreprise, les membres du comité de participation et du syndicat des travailleurs affirment pour leur part «ne pas savoir pourquoi les capacités de production nationale ne sont pas favorisées». «Malgré nos cris d'alarme et les doléances transmises à tous les niveaux, il ne nous reste aucune autre alternative pour protéger nos emplois et notre entreprise qui nourrit plus de 7000 âmes», ont-ils écrit dans un document, dont nous disposons d'une copie. Les rédacteurs de la lettre n'ont pas manqué de rappeler les risques qui pourraient découler de la démarche de Cameg. «Nos salaires, déjà rongés par une importante inflation, risquent de disparaître complètement si nos ateliers n'ont pas de travail», ont-ils averti. Les protestataires précisent que beaucoup de leurs camarades exerçant dans les unités de Sougueur (Tiaret), Aïn Oulmène (Sétif), Oum El Bouaghi, Chetibo (Oran)…, ont été licenciés à cause de l'absence d'un plan de charge. Un syndicaliste souligne dans ce sens que «ce n'est pas la première fois qu'on favorise des entreprises étrangères au détriment des sociétés nationales». «Il y a un grand décalage entre le discours et la réalité. Le gouvernement parle de la nécessité de créer de l'emploi alors qu'il fait tout pour faire grossir les rangs des chômeurs», a-t-il conclu avec amertume.