La crise politique qui a résulté de la décision prise, il y a peu, par les membres du Congrès général national (CGN, Parlement), la plus haute autorité politique en Libye, de prolonger d'une année leur mandat (il devait s'achever le 7 février dernier) semble sur le point de connaître son épilogue. Les parlementaires libyens sont, en effet, parvenus hier à un consensus sur des élections anticipées pour désigner de nouvelles autorités de transition. Des discussions sont toujours en cours sur les institutions qui devraient remplacer le Congrès : soit un nouveau Congrès, soit un Parlement et un président. Mais dans les deux cas, ces nouvelles élections vont probablement provoquer un changement du rapport de forces entre les différents acteurs politiques qui siègent dans l'actuel Parlement. Le Congrès avait, rappelle-t-on, décidé de prolonger son mandat jusqu'en décembre 2014, malgré l'opposition d'une grande partie de la population, qui critique son incapacité à rétablir l'ordre et à mettre fin à l'anarchie. Il avait adopté une «feuille de route» prévoyant des élections générales en fin d'année si la Commission constitutionnelle arrivait à adopter un projet de Loi fondamentale dans un délai de quatre mois après son élection, prévue le 20 février. Si la Constituante ne tenait pas le délai, le CGN devait appeler à des élections présidentielle et législatives en vue d'une nouvelle période de transition de 18 mois. Après avoir appuyé cette feuille de route décriée par l'opinion et essayé vainement de faire tomber le gouvernement Zeidan, le Parti pour la justice et la construction (PJC), issu des Frères musulmans libyens, a finalement appelé à passer «directement à des élections». Leurs rivaux de l'Alliance des forces nationales (AFN, libérale) s'étaient, pour leur part, opposés dès le départ à une prolongation du mandat du CGN. Une de leurs députés, Souad Soltan, a expliqué hier que l'AFN réclamait depuis des mois la dissolution de l'assemblée. Le CGN compte près de 200 membres élus en juillet 2012, lors des premières élections libres du pays. Le consensus trouvé par les membres du CGN est le bienvenu, car il pourrait enfin permettre aux Libyens de penser à l'essentiel. Et pour eux, l'essentiel consiste à sortir au plus vite de l'instabilité politique et du marasme économico-social dans lesquels ils se trouvent prisonniers depuis la chute du régime de Mouammar El Gueddafi. Depuis la fermeture, mi-2013, de ses principaux sites pétroliers, l'Etat est privé de l'essentiel de ses revenus. Dans un pays où le secteur pétrolier contribue à hauteur de 70% du PIB, de 95% des revenus de l'Etat et de 98% de ses exportations, cette donne, comme on peut donc aisément l'imaginer, a de lourdes conséquences sur la vie des Libyens. Selon des estimations du ministère libyen du Pétrole et de la Banque mondiale, la Libye a ainsi subi des pertes estimées à plus de 10 milliards de dollars depuis juillet. Et le Premier ministre Ali Zeidan a estimé que son pays était désormais «entré dans une crise économique», affirmant que «le gouvernement pourrait avoir des difficultés à payer les salaires» sur le budget 2014. Les ménages libyens qui avaient coutume de dépenser sans compter sont tombés de très haut. Qui l'eut cru !