L'institut supérieur arabe de traduction né suite à l'ordonnance 4163 du 02 mars 1982 du Conseil supérieur de la Ligue Arabe était convoité par l'Algérie. La diplomatie algérienne a joué des coudes, dès l'annonce du projet pour domicilier cette structure de l'instance panarabe sur ces terres. Ce fut chose faite dès le 31 du même mois. Mais depuis son inauguration officielle en janvier 2005, soit après neuf années, les diplômes délivrés par l'Isat ne sont toujours pas reconnus par les institutions algériennes. 7 promotions sont sorties des rangs de l'Institut et l'Isat attend toujours la validation de ses titres pourtant reconnus sous d'autres cieux. Eclairage. «En choisissant la qualité de la formation, on s'est retrouvés diplômés mais sans valeur», déplore Abdelkader, titulaire d'un magistère attribué par l'Institut supérieur arabe de traduction d'Alger. Installé en grande pompe en 2005 en présence du chef du gouvernement de l'époque, Abdelaziz Belkhadem et du secrétaire général de la Ligue arabe, Amr Moussa, l'Isat est né de la volonté conjointe de l'organisme panarabe et de la République algérienne sanctionnée par une décision du Conseil de la Ligue arabe datée du 31 mars 1982 domiciliant l'Institut sur le sol algérien ainsi qu'une convention signée entre les deux entités le 24 janvier 2005 sur son implantation à Alger. «Dès son installation à la présidence de la République en 1999, et face au manque de traducteurs de qualité, Abdelaziz Bouteflika a tout fait pour installer l'Isat à Alger. Il est intervenu personnellement auprès de la Ligue arabe pour domicilier l'Institut en Algérie», atteste Zineb Djahich, assistante de la directrice de l'Isat. Mais, comble de l'incohérence, plus de neuf années après son implantation et la sortie de sept promotions de diplômés, les diplômes délivrés par l'Isat ne sont toujours par reconnus par le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique. Pourtant, la convention cadre ratifiée par l'Institut et le Mesrs stipule bien à l'article 3 que «le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique reconnaît le diplôme délivré par l'Institut supérieur arabe de traduction après validation des exigences pédagogiques appliquées dans les établissement universitaires sous tutelle». «Depuis la création de l'Institut, nous avons produit tous les documents nécessaires et accomplit toutes les formalités exigées pour la validation de notre formation de magister. Malheureusement, le ministère ne donne aucune suite. Depuis presque une dizaine d'années, on nous dit toujours que le dossier est en étude», s'étonne l'assistante de la directrice. Il s'agit donc d'une problématique d'équivalence ou de reconnaissance de diplôme somme toute banale. Seulement, l'ironie de l'histoire, c'est que dans ce cas précis, il ne s'agit pas d'une qualification accordée par une école ou université de qualité douteuse installée au USA ou en Grande-Bretagne offrant au mieux payant des doctorats sans ancrage pédagogique. Il ne s'agit pas non plus d'une école privée dont la seule vertu est de garantir un poste de travail dans une grande entité économique publique à ses diplômés par le truchement de conventions intéressées. Il est question d'un Institut dérivé d'une instance internationale, la Ligue arabe, installé en Algérie par la volonté de ses officiels et dont les diplômes sont reconnus dans la grande majorité des pays membre de la Ligue. «Le magister délivré par l'Isat est reconnu au Liban, en Jordanie et dans de nombreux autres pays arabes. D'ailleurs, l'Arabie saoudite et le Koweit jouent des coudes à la Ligue arabe pour installer cet établissement chez eux. Nous recevons des étudiants boursiers de leurs Etats venus des quatre coins du monde pour apprendre la langue et de tous les pays arabes pour la qualité de la formation. Mais, en Algérie, nos diplômes ne sont toujours pas reconnus», argue Zineb Djahich en affirmant que 17 étudiants algériens issus de la première promotion de l'Institut ont été recrutés dans les organismes internationaux installés dans les pays du Golfe, 4 travaillent à l'Organisation de l'Union africaine, 1 au Conseil islamique d'Arabie saoudite et deux autres enseignent au Qatar. Pour attester de la qualité de la formation, l'assistante de la directrice fait valoir l'hétérogénéité des enseignants et étudiants inscrits. «Nous avons des conventions signées avec la Grande-Bretagne, la France, la Turquie, la Chine et autres pour la coopération en matière d'enseignants. On a aussi des encadreurs venus de Syrie, d'Irak, d'Egypte. Nous accueillons également des étudiants du Yémen et même des diplomates syriens et tunisiens», énumère-t-elle. Mais il reste que l'Algérie n'accorde toujours pas de crédit à cette formation puisque le ministère de l'Enseignement supérieur ne reconnaît pas le diplôme délivré. «Nous avons frappé à toutes les portes, écrit aux plus hautes autorités du pays, à la présidence de la République, aux cadres du ministère. Mais on n'a toujours par reçu de réponses claires. Du côté de la Ligue arabe, l'instance nous répond qu'elle n'y peut rien puisque la convention a été signée avec le Mesrs algérien. On ne sait plus quoi faire, même si il y a quinze jours nous avons encore adressé une correspondance au ministère», informe Zineb Djahich. De son côté, Abdelkader déprime : «sans cette reconnaissance, on ne pourra ni postuler pour un doctorat ni pour un poste de maître-assistant à l'université. Notre diplôme n'est mentionné ni dans la Fonction publique ni dans la Formation professionnelle.» Ce qui est ahurissant, c'est que du 18 au 20 décembre dernier, l'Isat a organisé un colloque international sur la «traduction et champs connexes» au palais de la Culture Moufdi Zakaria. L'événement s'est tenu sous le haut patronage du président de la République, de l'Unesco et du ministère de l'Enseignement supérieur ! Cherchez la logique...