Des éléments d'une brigade spéciale de la Gendarmerie nationale, en civil, au nombre de 9, ont investi, hier après-midi, les locaux de la chaîne privée Al Atlas, situés à Birkhadem (Alger), sur ordre du procureur de la République près le tribunal de Sidi M'hamed. «Aucun motif convaincant n'a été présenté», selon le directeur de l'information et de la rédaction, Hafnaoui Ghoul. Une dizaine de caméras et des appareils photo ont été saisis. Toutes les structures du siège de la télévision ont été inspectées. Les gendarmes ont pris des photos des différentes pièces. «Arrivés vers 15h, les agents sont repartis à 18h. Cependant, ils ont empêché le personnel de sortir et à d'autres d'entrer», témoigne M. Hafnaoui. Pour l'heure, la saisie du matériel et la perquisition ne signifient pas pour les responsables de la chaîne l'arrêt de la transmission. Hafnaoui Ghoul soutient que «cette inspection traduit une violation de la liberté d'expression». Selon lui, «la chaîne Al Atlas TV dérange le pouvoir». Et d'ajouter : «Nous invitons, dans nos émissions, autant de personnalités et des militants qui s'expriment librement et sans censure. Cette liberté que garantit Al Atlas TV n'arrange pas les tenants du régime.» Dans une déclaration à elwatan2014, le directeur général de la chaîne, Hichem Bouallouch, affirme que «l'ordre de perquisition n'est pas clair. Il est juste mentionné «perquisition des caméras qui ont fait des victimes». On ne comprend pas le motif de leur venue. La gendarmerie a aussi filmé les lieux». Les journalistes et le personnel de la chaîne n'en revenaient pas. Ils ne pouvaient imaginer une telle «intimidation», affirment des rédacteurs. L'un d'eux s'écrie : «C'est devenu pire que la Côte d'Ivoire. Ce n'est pas possible qu'un tel ordre de justice puisse cibler un média privé. Jusqu'où sont-ils capables d'aller ? Il faut que ces intimidations cessent une fois pour toutes.» Le directeur de l'information dénonce dans le même sillage «une violation des droits humains». «C'est une atteinte au droit d'informer. La population algérienne suit de très près notre chaîne et apprécie son contenu, différent des médias pro-pouvoir.» Pour certains journalistes de la chaîne, «cette perquisition est un avertissement». «Ils veulent nous dire d'arrêter de travailler librement. Sinon, la prochaine fois ce sera pire.» Hafnaoui Ghoul observe que «les couvertures des derniers rassemblements au centre d'Alger, en face de la Fac centrale et la transmission qui démontrent clairement les abus de la police et les atteintes à la liberté de manifester, sont à mon avis à l'origine de cet triste événement». Il ajoute que «les rassemblements du mouvement Barakat ont été suivis par la population grâce, entre autres, à notre chaîne. De ce fait, ils veulent que nous cessions les couvertures sur le terrain, et ce, en prévision des prochaines actions de ce mouvement». Colère de la corporation La nouvelle de la perquisition de la chaîne Al Atlas a été condamnée sur les réseaux sociaux, notamment par des journalistes. Ils expriment leur solidarité. «C'est scandaleux. Je dénonce cet acte odieux d'atteinte à la liberté d'expression et d'opinion en Algérie. Je suis totalement solidaire avec l'équipe d'Al Atlas TV», écrit Fayçal. D'autres journalistes se demandent : «Quel est le message politique que veut transmettre le pouvoir aux dissidents et à ceux qui s'opposent à la réélection de Abdelaziz Bouteflika ?» Force est de souligner que cette perquisition intervient dans un climat politique où différentes parties essayent de concrétiser un coup de force pour la reconduction de Abdelaziz Bouteflika.