Le président de la République préside la cérémonie de remise des lettres de créances de quatre nouveaux ambassadeurs    Le président de la République reçoit l'ambassadeur coordonnateur résident du Système des Nations Unies en Algérie    Les mesures relatives à la bourse des étudiants et des enseignants-chercheurs au pôle scientifique et technologique de Sidi Abdallah saluées    Le rôle "majeur" des travailleurs dans la lutte du peuple sahraoui souligné lors d'un forum à Aousserd    Soutien aux projets culturels et artistiques 2025: appel à candidature à l'endroit des associations    Sûreté nationale: lancement d'une campagne nationale de don de sang    Le Premier ministre reçoit l'ambassadrice serbe en Algérie    Cancer du sein: programme de sensibilisation au CHU de Beni-Messous    Affaires religieuses: coup d'envoi des sessions de formation à distance au profit des étudiants des instituts nationaux de formation spécialisée    Palestine occupée: des colons prennent d'assaut un site archéologique à Naplouse    Lancement des cercles d'apprentissage du saint Coran à Dar El-Coran    Boughali préside une réunion du bureau de l'APN    Boughali tient une réunion de coordination avec les présidents des groupes parlementaires    Le marché algérien des assurances en hausse de 8,8% au 1er semestre 2024    Le ministre tunisien des Affaires étrangères visite Djamaâ El-Djazaïr    Handball-Division Excellence : Coup d'envoi de la nouvelle saison    Les attaquants restent encore fébrile, l'arbitrage en conflit avec la VAR    Championnats d'Afrique : 3 médailles d'argent et 1 en bronze pour l'Algérie    Une histoire de succès mondial    Six décisions pour conforter les étudiants des sciences médicales    Plusieurs activités seront désormais soumises au régime d'IFU    Chute d'un jeune homme dans un puits de 10 mètres de profondeur    Campagne de sensibilisation au profit des étudiants sur l'adhésion au système de Sécurité sociale    Plus que 7 jours avant la clôture d'«Octobre rose»    Cérémonie de recueillement à Alger à la mémoire du Chef du Mouvement Hamas Yahya Sinwar    Une Commission de l'ONU appelle à une «action collective» contre l'occupation sioniste des territoires palestiniens    Manifestations dans des villes et capitales internationales pour dénoncer le génocide    Le musée menacé d'effondrement    «Je n'ai pas de mots pour décrire l'horreur que l'on voit… en Palestine»    Appel à son enrichissement et à la restitution des biens pillés    Boxe: Imane Khelif dévoile son parcours sportif et se projette sur l'avenir    Une occasion pour l'Algérie de défendre les causes palestinienne et sahraouie    Marathon international d'Imedghassen: la 14ème édition a réuni 1.200 coureurs    Tennis de table/Championnat d'Afrique: médaille d'argent pour la paire Bouhenni-Nasri    Signature d'un protocole de coopération entre les armées des deux pays    UIP : Des pays arabes boycottent l'allocution du représentant de l'entité sioniste en réponse à l'appel de l'Algérie    L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    Pôle urbain Ahmed Zabana: Ouverture prochaine d'une classe pour enfants trisomiques    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Une nouvelle étoile jaune
La chronique de Maurice Tarik Maschino
Publié dans El Watan le 10 - 04 - 2014

Il y a quelque chose de naïf et en même temps d'émouvant dans la décision qu'a prise un historien israélien, Shlomo Sand, professeur à l'université de Tel-Aviv, de ne plus être juif. Naïveté, comme si la judéité, tel un chapeau, pouvait s'enlever : pour la plupart de ceux qui ne sont ni juifs ni israéliens, un juif est un juif, qu'il le veuille ou non — on se rappelle l'analyse de Sartre : c'est l'antisémite qui crée le juif et le pourvoit d'une essence indélébile. Le plus stupéfiant est de retrouver la même démarche chez le législateur israélien : pour lui, un juif est un juif, qu'il le veuille ou non, puisqu'il est juif par sa mère. Si leurs raisons divergent, l'antisémite et le rabbin sont d'accord dans leur définition essentialiste du juif : bien que la notion de race, pour les scientifiques, n'ait aucun sens, tous deux estiment qu'il existe une «race» juive.
Certains en ont cherché la preuve, mais en vain, dans l'analyse de l'ADN. Sans aller jusqu'à cette absurdité, les théologiens juifs présupposent, contre toute raison, la transmission biologique, par les femmes, de la judéité. C'est cette ineptie que dénonce Shlomo Sand dans un texte qu'il a rédigé comme «une tentative désespérée de (se) libérer de cette étreinte déterministe, aveugle et aveuglante». «Laïc et athée», il récuse toute appartenance à «une ethnie fictive» et supporte encore plus mal de vivre dans «l'une des sociétés les plus racistes du monde occidental», qui, dans ses lois comme dans sa pratique, discrimine les non-juifs(1). Certains de ses étudiants sont d'origine palestinienne et citoyens israéliens, mais dans les registres de l'université ils sont identifiés comme «Arabes» et, comme tels, ont beaucoup moins de droits que les juifs.
Seuls les juifs, par exemple, peuvent acheter des terrains interdits aux non-juifs, ou trouver un emploi à la Banque d'Israël, «qui n'emploie aucun citoyen israélien-arabe». «Le racisme est omniprésent», insiste Shlomo Sand. Diffusé par les médias, il s'enseigne dans les écoles et inspire de nombreuses lois. Comme dans tous les Etats théocratiques, un juif ne peut épouser qu'une juive, le musulman qu'une musulmane, le chrétien qu'une chrétienne et un couple juif ne peut adopter qu'un enfant juif. La situation d'un juif dans l'Etat d'Israël, estime Shlomo Sand, correspond à celle d'un Blanc, en 1950, dans le Sud des Etats-Unis, ou à celle d'un Français dans l'Algérie d'avant 1962.
La supériorité qu'il s'attribue est totale : morale — «depuis quelques années, nombre d'intellectuels s'emploient à créditer le judaïsme d'une éthique supérieure» — et, plus profondément, humaine : «La différence entre une âme d'Israël… et l'âme de tous les non-juifs est plus grande que la différence entre l'âme d'un homme et celle d'un animal», ose écrire le premier grand rabbin de la communauté de colons en Palestine, Abraham Yitzhak Hacohen Kook. En clair, le juif, estime-t-il, est un surhomme. Comment les juifs, si souvent victimes de discriminations au cours de l'histoire, ont-ils pu construire un Etat aussi raciste et se conduire comme ceux qui autrefois les ostracisaient et opprimaient ?
Par quelle aberration ceux qui ont porté l'étoile jaune l'imposent-ils à une partie de leurs concitoyens ? Inversion d'un rejet multiséculaire ? Retournement d'un mépris subi en orgueil et suffisance ? Survalorisation d'une communauté qui tend à faire de chacun de ses membres un soldat prêt à mourir pour son pays ? En partie, sans doute. Rien n'est plus courant que la métamorphose d'anciens persécutés en persécuteurs et d'ex-racisés en racistes.
La religion s'y emploie, qui soude le groupe d'autant plus efficacement qu'elle est totalitaire. Mais d'autres facteurs interviennent : dès la proclamation d'Israël, «hébraïsation» des noms patronymiques, qui remplacent les noms de l'exil, choix de prénoms bibliques, rejet de la culture et de la langue yiddish, création d'une nouvelle langue, l'israélien, réforme de l'école, qui néglige l'enseignement des disciplines critiques, «les humanités et le savoir scientifique», service militaire, dont la fonction, comme toujours, est de fabriquer des êtres obéissants et soumis à la maffia au pouvoir. Le génocide n'a pas participé à cette construction. Jusqu'en 1970, il ne figurait même pas dans les programmes scolaires. Les rescapés des camps n'avaient pas bonne réputation et beaucoup même avaient honte.
La fin des années soixante, la victoire de Tsahal en 1967 changèrent radicalement cette image, et la victime juive, dont on cachait la faiblesse, se vit magnifiée et érigée en martyre. Le film de Claude Lanzmann, Shoah, acquit «le statut d'icône de la mémoire du génocide» et fit d'un crime industriel une tragédie exclusivement juive : seules les victimes juives du nazisme sont mentionnées, les autres, tels les 5 millions de Polonais, les Tziganes, les résistants communistes… n'apparaissent jamais dans l'évocation des crimes nazis. Comment vivre dans une société qui discrimine à la fois les vivants et les morts ? «Cela m'est devenu insupportable, dit Shlomo Sand, j'ai même souvent honte d'Israël. Mais, je l'avoue, il ne m'est pas moins difficile de vivre ailleurs.» Malgré tout, S. Sand refuse de désespérer et continuera d'écrire d'autres livres de vérité. «Afin, dit-il, de hâter d'autres lendemains». Lucide, il n'est pas sûr de les voir.

1) Shlomo Sand, Comment j'ai cessé d'être juif, «Café voltaire», Flammarion, 2013.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.