Le Nigeria est sous le choc. Des centaines de personnes ont été tuées dans un autre massacre de Boko Haram dans le nord-est du pays, où les Etats-Unis et la France vont aider les autorités à retrouver les quelque 200 adolescentes enlevées à la mi-avril par le groupe terroriste. L'attaque avait eu lieu lundi à Gamboru Ngala, une ville proche de la frontière camerounaise dans l'Etat de Borno, fief historique de Boko Haram, où avait également eu lieu le kidnapping des centaines de lycéennes le 14 avril. Selon des habitants, les assaillants circulaient à bord de véhicules blindés et de vans peints aux couleurs des forces de sécurité et ont brûlé le marché, le bureau des douanes, le commissariat de police et presque tous les magasins. Un sénateur local a évoqué hier le chiffre de 300 morts. Des témoins ont compté plus de 100 cadavres dans la localité dévastée et prévenu que le bilan risquait de s'alourdir. L'insurrection menée par Boko Haram, qui dure depuis cinq ans, a fait des milliers de morts (plus de 1500 depuis début 2014) au Nigeria, pays le plus peuplé et première économie d'Afrique. Les violences se concentrent dans le Nord-Est, où l'armée mène une vaste opération depuis un an contre les insurgés. Le recours à des milices privées, constituées de civils, contre les islamistes, a poussé Boko Haram à se retourner contre les populations locales. Avant l'annonce de cette nouvelle tuerie, le président américain, Barack Obama, avait indiqué dans la nuit qu'il envoyait des forces de sécurité américaines (militaires, policiers et «autres agences») pour aider le Nigeria à retrouver les plus de 200 lycéennes enlevées. Le président français, François Hollande, lui a emboîté le pas hier lorsqu'un nouvel enlèvement de 11 jeunes filles a été signalé, assurant que la France «fera tout pour aider le Nigeria». Une «équipe spécialisée» est disponible pour aider aux recherches, a précisé le ministre français des Affaires étrangères peu après. Mardi, Al Azhar, plus haute autorité de l'islam sunnite, avait appelé Boko Haram à relâcher les captives, soulignant que les traiter ainsi était «totalement contraire aux enseignements de l'islam et à ses principes de tolérance». Cette «situation révoltante», selon les termes du président américain, éclipse l'ouverture du Forum économique pour l'Afrique, un «Davos africain» qui s'est ouvert hier à Abuja sous sécurité maximale, un sommet sur lequel le Nigeria comptait pour vanter ses progrès économiques et améliorer son image internationale. Le président nigérian, Goodluck Jonathan, et son administration sont d'ailleurs critiqués par les familles des 276 jeunes filles enlevées pour leur inaction et leur incapacité à les retrouver. Plusieurs dizaines d'adolescentes ont réussi à s'enfuir mais plus de 220 seraient toujours aux mains des insurgés, selon la police. Le chef de Boko Haram, Abubakar Shekau, a menacé dans une vidéo de «vendre comme esclaves» les lycéennes ou de les «marier de force», un message qui a terrifié les familles et soulevé une indignation mondiale. Evoquant «une situation qui brise le cœur, une situation révoltante», M. Obama, au cours d'un entretien sur la chaîne américaine ABC, a estimé que cet enlèvement de masse «pourrait être l'événement qui aide à mobiliser la communauté internationale toute entière afin de faire enfin quelque chose contre une organisation aussi abjecte». L'Etat de Borno est, rappelle-t-on, l'épicentre de l'insurrection menée par les islamistes depuis cinq ans. Boko Haram, qui veut dire «l'éducation occidentale est un péché» en haoussa, la langue la plus parlée dans le nord du Nigeria, a commis de nombreuses attaques meurtrières dans des écoles, des lycées et des universités par le passé, mais ces enlèvements en masse d'adolescentes sont un fait nouveau.