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Le procès «kafkaïen» de Mohand et Moez
Un an ferme requis, verdict le 18 mai
Publié dans El Watan le 12 - 05 - 2014

Tribunal de Sidi M'hamed, rue Abane Ramdane. 9h30. Un dispositif de police inhabituel est déployé aux abords du palais de justice.
Les renforts diligentés pour assurer la couverture policière des lieux trahissent le caractère sensible du procès. Non, ce n'est pas le procès de Abdelmoumen Khalifa, ni de Chakib Khelil, encore moins de Amar Saadani. Il s'agit juste de deux jeunes, Mohand Kadi et Moez Benncir. Le premier est un étudiant de 23 ans et militant du RAJ. Moez, lui, est un ressortissant tunisien parfaitement en règle, assistant d'édition dans une maison franco-algérienne ayant une représentation à Béjaïa. Ils sont accusés d'avoir pris part à une manifestation non autorisée du mouvement Barakat, celle du 16 avril précisément, soit la veille de l'élection présidentielle, la place Audin.
Dans le hall du tribunal, les policiers sont nerveux. Ils filtrent et fouillent minutieusement les «usagers» du palais Abane. Ils scrutent d'un œil aiguisé les visages susceptibles de perturber les débats. Plusieurs militants politiques, convient-il de le signaler, ont fait le déplacement pour apporter leur soutien à Mohand et Moez. On notera notamment la présence, dans la salle d'audience, d'Ahmed Betatache, premier secrétaire du FFS, accompagné de plusieurs cadres du parti ; Abdelouahab Fersaoui, président de RAJ ; Hakim Addad, membre du Collectif pour la libération de Mohand Kadi et Moez Benncir ; Hacène Ferhati de SOS Disparus, auxquels s'ajoutent des militants du PST, de la LADDH ainsi que des membres du mouvement Barakat.
Coupable d'avoir appelé un membre de Barakat
10h. Après avoir expédié quelques affaires de droit commun, la juge appelle Mohand et Moez à la barre. Les deux jeunes sont cantonnés dans le box des accusés, encadrés par des policiers. Ils ont manifestement maigri mais s'affichent avec dignité. D'emblée, la présidente expose les chefs d'inculpation qui ont valu aux deux prévenus une détention provisoire qui en est aujourd'hui à son 27e jour. Mohand Kadi est accusé d' «attroupement non armé qui peut troubler la tranquillité publique» (article 97 du code pénal). Quant à son acolyte tunisien, il est accusé, en plus de ce «délit», d'être en situation irrégulière. La juge se lance ensuite dans un jeu de questions-réponses.
Les deux accusés livrent leur version des faits. «J'avais rendez-vous à TLS Contact à 11h pour déposer un dossier de visa», commence Moez Benncir. «Comme je ne connais pas Alger, j'ai demandé à mon ami Mohand de m'accompagner. Après avoir déposé mon dossier, nous sommes descendus en ville. Nous nous sommes attablés à un café au centre-ville. Après, ils ont arrêté Mohand, et ensuite, ils sont venus m'arrêter alors que j'étais assis devant mon café.» Mohand corrobore le récit de son ami avant d'ajouter : «Nous étions attablés dans un café. A un moment donné, je me suis levé pour aller acheter des cigarettes. En revenant sur mes pas, j'ai été interpellé par la police.»
La juge insiste pour savoir s'il était dans l'intention des deux jeunes de participer à la manifestation de Barakat. Elle surprend l'auditoire quand elle leur demande leurs numéros de téléphones respectifs. «Les relevés de vos appels téléphoniques démontrent que vous étiez en contact avec le coordinateur régional du mouvement Barakat», lâche-t-elle. Le comble est que ledit coordinateur était dans la salle. Mieux encore : l'une des personnes dont le nom a été cité s'est signalée à l'attention de la magistrate. Il n'en fallut pas plus pour que la juge ordonne aux policiers de l'accompagner à la porte. Dans son réquisitoire, le procureur s'est employé, lui aussi, à démontrer l'implication des accusés sur la base de leurs échanges téléphoniques avec des membres de Barakat. Dans la foulée, il avance cet argument «massue» : «Ils n'ont pas pris leur café à Tizi Ouzou, ni à Annaba, ni à Oran, ni à Ben Aknoun. Ils ont décidé, comme par hasard, de le prendre aux abords de la place Audin !» Au terme de son réquisitoire, le procureur a demandé l'application de la peine prévue par l'article 98 du code pénal dans toute sa rigueur et a requis un an de prison ferme.
Un procès politique
La plaidoirie des avocats de la défense s'étalera sur plus d'une heure. Pas moins de 15 avocats se sont mobilisés pour soutenir les deux accusés. Pour eux, les éléments du «délit d'attroupement» sont loin d'être réunis dans cette affaire pour la simple raison que dans le cas de l'infraction ici traitée, les accusés auraient dû être arrêtés en situation de flagrant délit. «Depuis quand deux personnes prenant un café à une terrasse constituent-elles un attroupement ? C'est une première dans le monde !» fulmine Me Amine Sidhoum. «Qui plus est, ils ne portaient ni pancarte ni banderole indiquant qu'ils étaient en train de manifester», renchérit un autre membre du collectif.
Me Badi s'étonne que la police judiciaire n'ait pas fait usage de la technologie pour confondre les présumés manifestants. «Pourtant, les caméras de la police ont tout filmé ! Je vous défie de me trouver une seule vidéo prouvant qu'ils ont participé à la manifestation !» martèle-t-il. Me Benissad rebondit également sur les allégations du procureur reprochant aux deux jeunes de se trouver à Alger au moment de la manif au lieu de reprendre illico la route de Béjaïa. «Depuis quand est-ce un crime de circuler dans la capitale ? La liberté de circulation est garantie par la Constitution», plaide-t-il.
Les avocats ont, par ailleurs, insisté sur un élément-clé prévu par l'article 97 du code pénal : la sommation. «Les peines prévues par la loi ne peuvent s'appliquer tant que l'interdiction de manifester n'a pas été signifiée aux manifestants par sommation», précisent-ils. «Toute l'accusation est fondée sur de présumés appels téléphoniques échangés avec des membres de Barakat. Mais ce mouvement n'est pas le Mossad israélien que je sache !» s'écrie Me Hassani, autre membre de la défense, avant de lâcher : «Barakat l'injustice ! Barakat les dépassements !»
Encore une semaine à Serkadji
Les avocats feront également remarquer «qu'aucun des 200 ou 300 manifestants qui ont pris part à cette action n'a été arrêté» et que «depuis des mois, nous assistons à des manifestations, tant à Alger que dans le reste du pays, sans que les manifestants soient sanctionnés». Amine Sidhoum enchaîne : «Nous voulons une justice qui consacre l'Etat de droit, non une justice qui serve des règlements de comptes politiques !»
Enfin, Me Bouchachi, brillant comme à l'accoutumée, dressera pour sa part un sévère réquisitoire contre l'appareil judiciaire qu'il accuse de tous les maux. Le magistrat instructeur en prend pour son grade pour avoir ordonné l'incarcération des deux jeunes sur la base d'un dossier vide. «Le juge d'instruction émet un mandat de dépôt, après, il rentre tranquillement chez lui, retrouve ses enfants, et fait la prière de l'îcha comme si de rien n'était», s'indigne l'ex-député, avant de reprendre : «Il est en train de se passer quelque chose de très grave dans notre pays. On ramasse des gens dans un café, puis, on les enferme pendant 25 jours en prison. C'est inacceptable !»
Et de conclure : «J'ai peur pour mes enfants, non pas du pouvoir politique mais du pouvoir judiciaire. L'histoire vous jugera !» Emotion dans la salle. La qualité des plaidoiries, la pertinence des arguments avancés n'y feront rien. Alors que tout le monde s'attendait à un non-lieu, la juge lève la séance en renvoyant Mohand et Moez à leur trou de Serkadji. Verdict : le 18 mai.


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