Le premier groupe privé algérien s'achemine-t-il vers une nouvelle acquisition outre-mer ? Cevital, qui a réussi à mettre dans son giron l'entreprise de portes et fenêtres en PVC, Oxxo, ainsi que le fleuron de l'électroménager FagorBrandt, attend pour demain la décision du tribunal de Nanterre pour trancher entre les quatre offres retenues pour la reprise du sidérurgiste français Ascométal. Le groupe Cevital a dû s'associer au fonds d'investissement américain Anchorage. Le groupe d'Issad Rebrab aura fort à faire face à la concurrence. Si parmi les éventuels repreneurs, l'offre d'Apollo, ancien détenteur du capital du sidérurgiste, a du mal à inciter l'assentiment, le brésilien Gerdau fait office de mastodonte ayant les faveurs de l'administrateur judiciaire de l'entreprise en redressement. Cependant, le brésilien semble plus intéressé par les sites du Nord et délaisserait ceux du Sud, car disposant déjà d'une unité en Espagne. L'offre du consortium d'industriels européen, emmené par Franck Supplisson, bénéficie du lobbying soutenu mené par cet ancien directeur de cabinet d'Eric Besson et ex-collaborateur de Christine Lagarde. Celui-ci a d'ailleurs réussi, en misant sur un certain chauvinisme européen, à rallier les principaux syndicats français, notamment la CGT, à sa cause, en plus d'avoir noyauté les cabinets ministériels. Néanmoins, l'offre de Supplisson pèche par le fait que le seul industriel comptant au consortium n'est autre que le suédois SKF, lequel nourrit l'ambition de neutraliser Ascométal pour en récupérer les parts de marché, nous explique le conseiller financier d'Issad Rebrab, Farid Bourenani. Le groupe algérien n'en démord pas pour autant et compte sur ses atouts. Ainsi, le groupe Cevital dispose d'un projet industriel inédit à faire valoir : celui du développement du site de Fos-sur-Mer, lequel n'intéresse aucun des repreneurs éventuels. Il s'est ainsi associé à Anchorage, lui-même allié aux créanciers d'Ascométal, à savoir Morgan Stanley et Bank of America. Le deal reposant sur le fait que l'offre de Cevital pourrait apporter la base industrielle dont le fonds d'investissement américain aurait besoin pour mener l'opération d'acquisition à bout, en contrepartie de quoi Cevital aurait tout le loisir de reprendre les sites du Sud en Isère et à Fos-sur-Mer. D'ailleurs, le patron du groupe Cevital expliquait, il y a quelques jours au magazine français Challenges, son intention d'implanter certains des projets qu'il n'a pu concrétiser en Algérie, en raison du temps qu'il faut pour obtenir les autorisations nécessaires, sur le site de Fos-sur-Mer. Issad Rebrab a ainsi expliqué son souhait de réhabiliter l'unité la plus déficitaire du groupe, en portant ses capacités de 135 000 tonnes d'aciers spéciaux à 1 million de tonnes dans une première phase et 2 millions de tonnes d'ici à 3 ans. Il ambitionne aussi de réaliser cinq quais, dont deux réservés aux activités de sidérurgie et deux aux agro-industries, vu que Cevital projette de réaliser une unité de trituration de graines oléagineuses, et unité d'ethanol (biocarburants). Il a ainsi expliqué à Challenges qu'en plus des 1800 emplois à sauvegarder sur les 1900 de l'entreprise, ses projets permettront de doubler les effectifs de Fos-sur-Mer. Il pourra ainsi compter sur des techniques d'ingénierie financière, vu que 85% des investissements pourraient être financés par crédit-fournisseur. De plus, il peut compter sur les actions acquises dans le groupe russe Vimpelcom ainsi que des prêts des filiales Cevital dans le monde pour garantir les financements nécessaires. Des atouts qui permettent à l'industriel algérien de présenter une offre en association avec 620 millions d'euros. Pour M. Bourenani, Ascométal représente une acquisition très intéressante pour Cevital, car l'apport concret au développement du projet serait très en deçà de la valeur patrimoniale de l'entreprise évaluée à 300 millions d'euros. Aussi la reprise d'Ascométal permettrait de réaliser des synergies avec l'Algérie et de valoriser le potentiel de Fos-sur-Mer. Il explique aussi que tant que Cevital n'a pas la main sur les tenants et les aboutissants de l'opération, son association avec Anchorage n'est pas exclusive. Le groupe est donc prêt à négocier avec d'autres repreneurs susceptibles de l'embarquer dans l'opération et de lui permettre de concrétiser les projets sur les sites du sud de l'Hexagone.