Vedette en Italie, bon joueur pour le reste du monde, Francesco Totti tient avec la finale du Mondial 2006 une magnifique dernière chance de montrer à toute la planète football l'étendue réelle de son talent, demain à Berlin contre la France, avant sa retraite internationale. Prophète en son pays, Totti, 29 ans, est le capitaine-buteur-idole de la Roma, son emblème, le seul autre maillot qu'il ait revêtu étant l'azzurro de la sélection nationale. Mais en bleu, dans les grandes compétitions internationales, yeux et caméras braqués sur lui, Totti a déçu : 57 sélections, seulement 9 buts. Il est plutôt convaincant à l'Euro 2000, où il joue, à la pointe de l'attaque, cinq des six matches et marque deux buts. Mais il s'effondre, comme toute l'Italie, quand la France égalise à 17 secondes de la fin de la finale avant de priver la Squadra d'un trophée dont elle avait déjà empoigné une anse (1-2 au but en or). Les performances de Totti, assez réussies, sont effacées par l'invraisemblable scénario. En 2001, il atteint la consécration nationale en ramenant dans une Rome en folie un Scudetto attendu depuis 1983 et le sacre de la bande à Giuseppe Giannini, le Petit Prince de la Roma, un Totti avant Totti, adulé à l'Olimpico, mais jamais transcendant sous le maillot de l'Italie. Il débarque en Asie escorté d'une nouvelle curiosité. Que vaudra au Mondial 2002 la nouvelle coqueluche des Italiens ? Las, il ne marque pas puis est – sévèrement – exclu en 1/8e de finale, contre la Corée du Sud, après un plongeon dans la surface. Il peut toujours se défendre en pointant le doigt vers un arbitrage sévère, mais l'Italie attend une revanche pour l'Euro 2004. Totti touche pourtant le fond avec une exclusion cette fois dès le premier match, contre le Danemark, et cette fois méritée : il a craché sur Christian Poulsen. Verdict : quatre matches de suspension et un retour penaud à la maison avec une Squadra éliminée dès le premier tour. En Allemagne, Totti arrive sur une jambe, imparfaitement remis d'une fracture du péroné gauche subie en février. Toute l'Italie du football est suspendue aux comptes rendus médicaux, le défenseur d'Empoli qui l'a blessé, sur un tacle rugueux, Richard Vanigli, a pleuré. Il craint d'avoir privé les Azzurri de leur atout maître. Seigneur, Totti lui a accordé son pardon publiquement et il a joué en Allemagne. Mais au premier tour, il est transparent, la presse italienne l'agonit. Lippi le laisse même sur le banc au coup d'envoi du 1/8e de finale contre l'Australie en raison de la grande fatigue affichée par le joueur après le dernier match de poule contre la République tchèque gagné 2-0. Mais Totti entre en jeu et convertit, de ses nerfs d'acier et de son pied droit, le penalty décisif (90'+5, 1-0). « Maintenant, que les critiques parlent de moi, dit-il après le match. Jusqu'ici, ils m'ont massacré. Je suis sûr qu'ils ne vont pas être contents. Je ne leur ai jamais répondu, j'attendais de donner ma réponse sur le terrain. » En quarts et en demies, il n'est pas décisif, mais offre quelques jolis coups d'archet qui laissent entrevoir son talent de soliste. Il ne lui reste plus que la finale pour exploser, puisqu'« il va quitter la sélection nationale à 90% », selon Lippi.