Une entrée à l'OMC, actuellement, est un acte suicidaire.» Cette affirmation de Mohand Saïd Naït Abdelaziz, président de la Confédération nationale du patronat algérien (CNPA), résume la situation économique d'une Algérie qui souhaite, sans réussir, occuper l'un des tout derniers sièges de l'Organisation mondiale du commerce. En dehors de quelques tentatives des opposants au projet, l'adhésion de l'Algérie à l'OMC ne suscite pas de débat. C'est pour cela que le FLN a organisé, dans la soirée de jeudi, à Alger, un débat passionnant sur cette question qui préoccupe la classe politique et les opérateurs économiques. Le débat était tellement captivant que partisans et opposants à l'entrée de l'Algérie à l'OMC se sont affrontés avec des arguments parfois très forts. Premier à ouvrir les «hostilités», l'expert Mouloud Hedir, ancien directeur du commerce extérieur, a posé la pertinente question du retard pris par l'Algérie pour intégrer l'OMC. Pour lui, il n'y a aucun doute : ce retard est politique. «Sur le plan technique, rien ne peut empêcher notre pays d'adhérer à l'OMC», a-t-il soutenu. Pour illustrer ses propos, il donne des exemples concrets : l'Algérie a un marché extérieur «beaucoup plus libre que nombre de pays membres de l'OMC». Puis, M. Hedir a signalé que «l'Accord d'association avec l'Union européenne est beaucoup plus désavantageux que ce qu'offre l'OMC». L'argumentaire de M. Hedir est repris par d'autres intervenants. Ainsi, Abdelkader Cherrar, ancien député du FLN, est allé plus loin : «Nous n'avons pas à avoir peur de l'OMC. Nous devons, par contre, avoir peur de notre incurie et de notre incompétence à offrir à notre pays une économie forte.» L'homme, connu pour son franc-parler, a évoqué des «lobbies qui ont pris en otage ce pays, ce peuple et son économie». «Les entreprises algériennes ne sont pas prêtes» Le raisonnement est également repris par l'ancien ministre du Commerce, Bekhti Belaïb, qui atteste que «des responsables, dans ce pays, ne veulent pas que l'Algérie adhère à l'OMC». Pour s'en convaincre, il cite l'exemple de la conférence de Marrakech, en 1994, signant la naissance de l'OMC. A la veille de cette réunion, le gouvernement algérien avait été changé. Résultat : le pays ne pouvait pas être membre à part entière parce que le ministre de l'époque ne pouvait pas signer le document. Farouche opposant à l'entrée de l'Algérie à l'OMC, Mohamed Badredine, ancien dirigeant de l'UGTA, a repris les arguments de la centrale syndicale et ceux de Louisa Hanoune : «Notre économie n'est pas prête.» Puis l'ancien syndicaliste des pétroliers s'est demandé si «les pays arabes ayant intégré l'OMC vivent mieux». « Tous les pays arabes qui ont intégré l'OMC ont des problèmes économiques», a-t-il répondu, citant les exemples de la Tunisie et du Maroc. Pour l'orateur, l'OMC veut «supprimer la politique de subventionnement» de l'Etat. Une thèse réfutée par beaucoup de présents, qui estiment que cette politique est «anormale» puisqu'elle ne vise pas que les pauvres. Ce débat, qui a duré plus de deux heures, est le premier sur un sujet qui ne manquera certainement pas de soulever des polémiques. Surtout que tous les présents, partisans ou opposants de cette option, se sont accordés sur un point : personne ne peut décider d'une échéance d'entrée à l'OMC.