Nous ne sommes pas contre l'idée du relogement. Nous dénonçons cette manière de faire qui est loin d'être transparente, encore moins juste. Une manière faite dans la précipitation et l'improvisation les plus totales. » C'était le message formulé, hier, par le comité du quartier des Planteurs qui a appelé au report de l'opération de relogement du premier lot de 790 foyers qui devrait intervenir demain, les familles étant appelées à emménager dans la nouvelle cité de Haï El Yasmine (est d'Oran). Ce comité animait un point de presse hier, dans une salle surchauffée par une foule décidément contestataire. Dans une ambiance des plus électriques, la dizaine de délégués a appelé à la sagesse et a réclamé « un nouveau recensement qui sera cette fois-ci juste et tenant compte de la réalité sociale des habitants ». Les contestataires s'en sont pris au recensement effectué en 2003 par l'URSA, qui a été actualisé en 2006. Ce travail avait dénombré près de 12 000 familles vivant dans ce quartier populaire qui devait faire objet d'une opération de relogement de 9000 foyers dans le cadre de l'éradication de l'habitat précaire. Le comité avance déjà le chiffre de « 200 familles se considérant lésées ». « Nous sommes 13 à vivre dans une grande et belle maison de 7 pièces. J'ai dépensé plus de 200 millions de centimes dans les travaux. Trouvez-vous juste que tous mes sacrifices s'évanouissent, dimanche, lors de la démolition de ma maison ? Comment accepter d'emménager dans un F3 ! », dit d'un ton révolté Houaria, née dans ce quartier il y a 63 ans. La maison de cette vieille dame que nous avons visitée hier est située sur le tracé de la future ligne téléphérique. Elle est donc appelée à être rasée demain. Pourtant, elle n'a rien de précaire. Le cadre est même agréable. De la faïence importée d'Espagne, au climatiseur… Bref, rien à voir avec l'image d'un taudis précaire. « Nous n'allons tout de même pas payer les frais d'une politique approximative faite d'improvisation et de maladresses. C'est bien de reloger les gens, mais faut-il accomplir un travail complet qui ne laisserait personne sur le bord de la route. » Les critiques pleuvent, se suivent et se ressemblent. Puis, il y a les commerçants, ceux qui tiennent des boutiques rentables qu'ils ne veulent pas quitter pour un espace plus réduit et plus lointain. De son côté, le wali d'Oran, qui s'exprimait jeudi devant la presse, promettait que « tout a été fait pour permettre de reloger les familles dans les meilleures conditions ». Moins de 24 heures après cette déclaration, un document vidéo projeté hier montrait une nouvelle cité - Haï El Yasmine - isolée, sans âme et surtout sans infrastructures de base. Un site qualifié de « désert » par une voix qui commentait ce modeste documentaire amateur. La cité compte 400 F2 et 390 F3. « Emménager dans un F2 » constitue la principale « aberration » pour ces habitants dont la majorité est composée de familles élargies où cohabitent trois, voire quatre ménages sous le même toit. Tout en se disant « contre la violence », les riverains n'écartent pas « le recours à la justice dans l'espoir de se voir un jour relogés dans des conditions plus dignes et justes ».