Tout est cher, surtout la restauration. Pour profiter de la plage, il faut débourser pas moins de 1000 DA par jour sans oublier les extras. Contrairement aux attentes, la saison estivale amputée du mois de juillet (Ramadhan) n'a pas enregistré un rush particulier sur la corniche oranaise en ce mois d'août. Les plages sont moyennement occupées et, en fonction des attentes, la qualité de service est appréciée de façon mitigée par les vacanciers. «J'ai l'habitude d'aller sur la côte mostaganémoise, cette année j'ai voulu changer de décor et je peux dire que je suis satisfait», indique un estivant de l'Etoile, une plage réputée de la côte ouest d'Oran. Comme la plupart des plages, celle-ci est cédée en concession, d'où l'aspect familial qui la caractérise, à condition de payer le prix. Cette année la location d'une table, quatre chaises et un parasol atteint 800 DA et, pour beaucoup, la tranquillité en vaut la peine. «Je viens ici depuis 1997 et, pour moi, l'endroit est agréable avec une bonne ambiance», indique Abdelkader, lui aussi venu en famille pour profiter de la fraîcheur de l'eau. «On peut dire que j'ai accompagné l'évolution de cet endroit, mais il est loin le temps où on pouvait louer le même matériel pour seulement 300 DA», précise-t-il. Le concessionnaire de cette partie de la plage (ils sont deux à se partager l'Etoile) est fier de dire qu'il est là depuis 1987 alors qu'il n'avait que 11 ans. Pour lui, l'augmentation des prix est justifiée par le fait que la saison 2014 est très courte. «J'ai un contrat de 5 ans, mais je paye chaque année et comme cette année le Ramadhan est tombé en plein mois de juillet, nous n'avons pas d'autre choix que d'augmenter les prix pour rentrer dans nos frais», indique Fares dont la famille, y compris la mère, gère une supérette et un coin pour les douches et les toilettes. «Notre gestion est familiale, c'est pour cela que nous tenons à la sérénité des lieux», précise-t-il. Non loin de là, Bomo-Plage, à la sortie ouest de Coralès, un village de pêcheurs devenu une petite station balnéaire, est également réputée pour être une des attractions de la corniche oranaise. Située à proximité de la route, elle offre plusieurs commodités, y compris le stationnement. A côté du parking, une buvette, qui diffuse en boucle des chansons de Abdelkader Chaou, ne désemplit pas. Le site, coincé entre les eaux turquoises de la mer et les dunes de sable ocre, offre une vue dégagée. Ici, la particularité est que ce sont des jeunes qui tiennent le lieu depuis déjà quelques années. Un travail saisonnier mais régulier, une trouvaille de l'APC de Bousfer qui a privilégié l'emploi de jeunes plutôt que la mise en concession aux enchères, comme c'est le cas habituellement. «Nous sommes une trentaine de jeunes à travailler ici avec une autorisation de l'APC de Bousfer, qui nous accorde ce privilège pour un tarif avantageux», indique Abdelkader, qui met en avant l'aspect sécurité de la plage grâce à la présence de la Protection civile et de la gendarmerie. Pour éviter les problèmes, les jeunes célibataires sont en général obligés de louer leur matériel dans un carré qui leur est réservé. «Il arrive que des familles optent pour des locations au milieu des jeunes à qui nous accordons par ailleurs des facilités sachant que la majorité d'entre eux ne travaillent pas», ajoute-t-il. Tous les concessionnaires s'accordent à reconnaître la cherté du matériel (tables, chaises et parasols) dont les prix ont plus que doublé parfois. Aujourd'hui, pour les estivants, ce ne sont plus les locations de maison qui représentent le gros des dépenses. Tout est cher, surtout la restauration avec un rapport qualité-prix très désavantageux. «Pour profiter de la plage, nous sommes obligés de débourser au minimum 1000 DA, sans compter les suppléments quand la famille est nombreuse», explique un estivant contraint d'abréger son séjour. Les structures d'accueil, quand elles existent, sont hors de prix. Néanmoins, petit à petit, Aïn El Turck, qui dispose de 5 entrées de plagedont Trouville, Bouisseville et Paradis-Plage, commence à se doter de structures hôtelières dignes de ce nom. Ouvert il y a à peine une année, l'Hacienda, qui fait face à la nouvelle promenade de Cap Falcon, privilégie le concept «appart-hôtel» (20) pour un tarif moyen de 20 000 DA la nuit. C'est n'est pas à la portée de tous, mais son propriétaire assure qu'il y a une forte demande interne. «J'ai la catégorie 3 étoiles avec une piscine et un restaurant, mais mon établissement ne sert pas d'alcool, c'est un choix délibéré», indique M. Mehiaoui, qui avoue que, malgré tout, l'offre hôtelière reste loin des standards internationaux. «J'ai reçu des étrangers, eux ne lésinent pas sur les remarques et sont regardants sur les moindres détails», explique ce nouvel investisseur, qui a fait des efforts pour se mettre au niveau : «Cette année, j'ai accepté des réservations par téléphone, mais l'an prochain je ne le ferai pas, car les gens manquent de sérieux au point que j'ai été amené à résilier 90% des réservations.» Que dire alors de l'outil internet, même si son établissement possède son propre site, juste pour l'information. Non loin de là, à proximité de la place centrale de Aïn El Turck, le Monaco vient d'ouvrir ses portes (début juin). Les aménagements ne sont pas finis et cet établissement hôtelier affiche déjà presque complet. Les chambres particulièrement vastes et bien aménagées sont cédées en moyenne à 8000 DA la nuit. L'hôtel est construit à 70% sur fonds propres (deux associés) et la gestion a été confiée à un ancien restaurateur qui, au début des années 2000, a créé l'Hacienda, un restaurant célèbre à Canastel. «La clientèle est familiale à 80% et si je vise uniquement un classement 3 étoiles, c'est parce que je n'ai pas de piscine par manque d'espace. Mais la plage est à deux pas», explique le gérant, qui met en avant le restaurant gastronomique panoramique situé au 4e étage et qui offre une vue presque à 360 degrés sur la baie de Aïn El Turck. Globalement, cette commune (chef-lieu de daïra) dispose de 70 hôtels, toutes catégories confondues, entre cabarets-hôtels, bar-hôtels et hôtels tout court, mais dont la qualité laisse à désirer, hormis quelques établissements anciens et déjà réputés. Le chiffre approximatif est donné par un chef de service à l'APC, qui se désole du fait que la commune ne tire aucun profit de la manne touristique. «Le tourisme ne rapporte rien à l'APC, qui n'a presque pas de ressources hormis les droits de voirie ou de fêtes (1000 DA) qui restent symboliques», tranche M. Sahraoui, qui pense à la taxe de séjour qui, dit-il, n'est même pas perçue. C'est peut-être pour cela que certains jeunes tentent de se prendre en charge eux-mêmes. Azzedine est un des jeunes du quartier de Bouisseville qui ont pris les choses en main en décidant de nettoyer la plage et, en contrepartie, de proposer eux aussi des services de location de matériel, mais à 500 DA seulement. «Nous avons effectué 7 voyages pour débarrasser la plage de toutes les ordures qui se sont accumulées durant l'année», explique-t-il, en saluant l'intervention de l'APC qui a installé des toilettes et des douches. «Cette plage a beaucoup changé depuis qu'on a aménagé la route et réglé le problème des eaux usées (station d'épuration)», explique Idir, qui habite là depuis 40 ans. Tailleur de profession, il a préféré ouvrir, il y a 20 ans, une pizzeria, qui sert encore aujourd'hui des spécialités maison. Il est l'un des résidants de la corniche qui bénéficient de manière saisonnière de l'affluence des estivants. Une partie de sa maison est régulièrement louée à de jeunes vacanciers, à condition qu'ils respectent les conditions qu'il leur impose : ne pas déranger les voisins. Mais la vie nocturne à Aïn El Turck est une toute autre histoire.