Visiblement encouragé par la paralysie du Conseil de sécurité des Nations unies, Israël s'est acharné sur le Liban, ce qui n'est pas une première pour ce pays qui se relève par ailleurs d'une coûteuse guerre civile attisée par le voisin israélien. Depuis mercredi dernier, le pays du Cêdre est broyé par la machine de guerre d'Israël qui a dévoilé ses objectifs après avoir prétendu vouloir libérer deux de ses soldats enlevés par le Hezbollah. Le premier ministre israélien a en effet fixé les conditions pour un cessez-le feu, et il s'agit entre autres du désarmement du Hezbollah, souhaité ou demandé par la résolution 1559 (du sur mesure pour Israël), mais totalement écarté ou différé dans le temps par les autorités libanaises qui considèrent le Hezbollah comme il se revendique lui-même, c'est-à-dire un mouvement de résistance contre l'occupation israélienne. Il est d'ailleurs bien curieux qu'une telle situation soit passée sous silence surtout par ceux qui appellent le Hezbollah à mettre fin à ses attaques, ou encore qu'Israël a le droit de se défendre. Mais ceux-là ont-ils visité les prisons israéliennes, ou encore ont-ils enquêté sur les personnes détenues, toutes enlevées en territoire libanais. Là est justement le nœud de la question malheureusement occultée. Un tel aveuglement délibéré bien entendu, car de tels faits ne peuvent échapper à ceux qui veulent régenter le monde ou en être la conscience, ne peuvent encourager l'établissement d'une paix sûre et durable. Porté par cette tendance, Israël a donc intensifié ses attaques au Liban. Pratiques criminelles Dans le sud-Liban, l'offensive d'Israël a continué à pousser à l'exode les habitants des villages frontaliers, rappelant la politique du vide menée durant les années 1980 avant que ne soit édifiée en territoire libanais, une zone dite de sécurité confiée à une armée de supplétifs libanais sous l'appellation d'armée du Liban-sud. C'était véritablement partir ou mourir. Marqués par de telles pratiques criminelles, plus de 10 000 habitants de ces villages ont donc fui. Et rien ne semble pouvoir arrêter cette guerre que certains déplorent, mais que d'autres justifient par son premier acte, c'est-à-dire l'opération anti-israélienne du Hezbollah. A cet égard, le président américain George W. Bush a exigé hier du Hezbollah qu'il dépose les armes et cesse ses attaques sur Israël pour mettre fin à l'escalade de la violence au Proche-Orient. « La meilleure façon de stopper la violence est que le Hezbollah dépose les armes, cesse d'attaquer Israël », a-t-il dit. Il a appelé la Syrie à « exercer son infuence » sur les miliciens libanais pour les convaincre de cesser de lancer des opérations contre Israël. Cela fait deux choses en même temps, et dans tous les cas deux cibles puisque le premier figure sur la liste américaine des organisations terroristes, et le second, un pays qui les soutient. Ce qui impose de facto, une limite à la politique américaine déjà qualifiée par d'éminents spécialistes américains, de pro-israélienne. Vendredi, le président Bush s'était refusé à faire pression sur Israël afin qu'il stoppe son agression contre le Liban. Aux Etats-Unis, les voix sont rares à s'élever pour une intervention, comme l'a fait vendredi le sénateur Chuck Hagel, un républicain souvent critique de l'administration. « Face à cette situation délicate, l'escalade de la violence pourrait engendrer un conflit régional et y entrainer les Etats-Unis et le reste du monde », redoute le sénateur. « Les Etats-Unis doivent aider rapidement et activement à la stabilité et à désamorcer une situation dangereusement volatile », estime-t-il encore. Ce qui ne semble pas convaincre le président Bush qui a manifesté sensiblement la même position à l'égard des Palestiniens, eux-aussi victimes d'une vaste attaque israélienne, et empêché l'adoption par le Conseil de sécurité d'une résolution demandant justement l'arrêt de cette agression. D'ailleurs, le mouvement palestinien Hamas, cible de l'agression israélienne, figure lui aussi sur la fameuse liste américaine, et Washington a adopté des sanctions financières contre le gouvernement palestinien que dirige ce mouvement arrivé aux affaires par la voie des urnes. La déclaration de la secrétaire d'Etat Condoleezza Rice procède de cette position. Au premier ministre israélien, elle a souligné « le fait que tout Etat qui est attaqué par des terroristes ou n'importe qui d'autre a le droit de se défendre lui-même ». Mais cela tend à entretenir un rapport extrêmement dangereux, un cercle infernal où prévalera la loi du plus fort. Une position qui tend paradoxalement à maintenir le statu quo qui est celui de l'occupation de territoires par la force. Un acte condamné par les conventions internationales, et les Etats-unis, rappelle-t-on, ont déclaré la guerre à l'Irak en 1991 pour libérer le Koweït. Faut-il donc que les Arabes renoncent à leurs droits pour avoir la paix ?