C'est une belle démonstration de leur pleine citoyenneté que les musulmans de France ont administrée, hier, à certains indécrottables esprits soupçonneux. Les partisans de l'extrême droite et autres milieux sionistes qui écument les tribunes politiques et médiatiques parisiennes en ont eu pour leurs «clichés». Les musulmans de France sont certes attachés à leur religion mais sont tout autant jaloux de leur pays d'accueil. En un mot : la République, ses valeurs et ses espérances. C'est un succès grandeur nature qu'ont réussi hier les musulmans de l'Hexagone en criant à qui voulait bien les entendre que leur culte ne les rapproche pas forcément des monstres de Daech qui sont la négation même de l'humanité, comme l'enseigne le texte sacré du Coran. Ces milliers de musulmans et de non-musulmans, qui se sont donné rendez-vous hier devant la Grande Mosquée de Paris à l'appel du CFCM, ont ainsi signifié qu'ils n'ont rien à voir avec les hordes qui ont décapité le pauvre Hervé Gourdel en Haute-Kabylie. Certains Français chantres de la stigmatisation voulaient absolument soumettre la communauté musulmane à cette épreuve. Du haut de leur bêtise, ils pensaient vraiment que le combat horrible de Daech était encouragé y compris dans les mosquées françaises. Dans un climat marqué par une islamophobie ambiante, c'était en effet une occasion en or pour montrer l'islam et les musulmans de France du doigt. Les désigner à la vindicte populaire même si les crimes sont commis très loin, au-delà des Pyrénées. Les irréductibles propagateurs de la littérature de la haine étaient prêts à dégainer leurs chefs d'inculpation contre une communauté sommée de montrer patte blanche. Il faut donc se féliciter – même si certains représentants du culte musulman ont refusé de servir de boucs émissaires – de ce que le rassemblement d'hier ait été un sermon rageur contre la barbarie. Il était aussi une fatwa en faveur de la solidarité de toute la France sans distinction d'origine et de religion contre l'hydre de «l'Etat islamique», qui a tranché la tête d'Hervé Gourdel. De ce point de vue là, l'initiative du CFCM, soutenue par toutes les organisations cultuelles de France, a été un franc succès. N'en déplaise aux partisans de la stigmatisation systématique, les musulmans ont prouvé leur «francité» dans cette belle communion dans la douleur. Et la participation de la Coordination des chrétiens d'Orient en danger (Chredo) à la manifestation a conféré un caractère œcuménique à cette initiative citoyenne qui rassemble au-delà des différences culturelles et cultuelles. Parce que face à la sauvagerie, il ne peut y avoir qu'un point de vue : la condamnation sans réserve. Beaucoup d'élus et d'anciens ministres «Français de souche» ont été témoins hier. Témoins de ce grand moment de mobilisation populaire contre le terrorisme initié par ceux-là mêmes que les malades de l'émigration considèrent comme des «pièces à conviction» de leur nature sinon «terroriste» du moins «dangereuse». Ce discours gorgé de haine a fait du musulman de France un citoyen en sursis, avec la mention «A suivre…». Puisse donc le rassemblement d'hier aider à déconstruire cette idéologie en vogue en France qui fait du musulman forcément un terroriste potentiel. Amen.