Les trois ministres représentant les autorités de Bamako ont quitté Alger hier après-midi. Certains membres de la communauté internationale aussi. La troisième session des discussions de paix intermaliennes semble se terminer sans avoir obtenu le résultat escompté. Au mois de septembre, les mouvements armés du Nord et les autorités de Bamako avaient remis leurs propositions d'accord de paix à la médiation internationale (Algérie, Burkina-Faso, Mauritanie, Niger, Tchad, Cédéao, Union africaine, Union européenne, Organisation de la coopération islamique et Nations unies). La médiation internationale a élaboré un document de travail intitulé «Eléments pour un accord de paix et de réconciliation au Mali». Ce texte de 14 pages est divisé en huit parties et fait le tour des thèmes évoqués au fil des différentes sessions de discussions d'Alger. Zone de développement au Nord Pour ce qui est des questions politiques et institutionnelles, le texte propose la création d'une «zone de développement des régions du Nord», dotée d'un «conseil consultatif interrégional constitué des représentants des assemblées régionales et chargé exclusivement de la coordination des efforts visant à accélérer le développement socioéconomique local». La médiation a également proposé la création d'un Sénat «représentant les collectivités territoriales et les notabilités traditionnelles et religieuses», qui «émet un avis sur tout projet de loi concernant les relations entre l'Etat et les collectivités territoriales et participe à l'évaluation des politiques publiques». Le texte souligne que le Sénat «pourrait créer une commission chargée de la défense des spécificités culturelles régionales» et qu'un «quota de sénateurs pourrait être réservé aux notabilités traditionnelles régionales». Pour assurer une meilleure représentativité de toutes les composantes de la population, la médiation propose aussi que les députés de l'Assemblée nationale soient élus dans un ratio de un pour 30 000 habitants dans les régions du Nord, au lieu de un pour 60 000 habitants comme prévu par la loi actuellement. Enfin, la communauté internationale propose que le rôle des cadis dans le secteur de la justice soit revalorisé «notamment en ce qui concerne la médiation civile et pénale». Etat-major mixte Dans les propositions liées aux questions de défense et de sécurité, le texte fixe une série de mesures transitoires pour «la confiance et la stabilisation» qui seraient prévues pour une durée maximum d'une année comme la mise en place d'un Etat-major de coordination (EMCO) basé à Gao et dont le commandement serait placé «alternativement sous le commandement d'un officier de l'armée malienne et d'un représentant des mouvements armés, avec l'appui de la Minusma», la force des Nations unies. Cette période d'un an doit permettre, selon le souhait des médiateurs, de procéder au cantonnement des combattants, à la réinsertion, à la réintégration et au redéploiement de forces de défense et de sécurité «qui devront inclure un nombre significatif de ressortissants des régions du Nord, y compris dans le commandement». Les pays voisins et les organisations internationales consacrent une partie de ce texte à une «mobilisation nationale en faveur du développement des régions du Nord» et proposent, entre autres, «l'adaptation des programmes d'enseignement aux réalités socioculturelles des régions», la consécration de 10% de l'aide internationale aux trois régions du Nord ainsi que des mesures d'urgence comme la réhabilitation des écoles, le renforcement des structures de santé, la réhabilitation des puits et la «distribution gratuite de produits alimentaires aux ménages en situation de précarité». Le document prévoit une «conférence d'appel de fonds pour le financement de la stratégie de développement des régions du Nord», appuyée par la Banque mondiale et la Banque africaine de développement. La communauté internationale garante Les médiateurs affirment être conscients que «la récurrence des crises affectant le nord du Mali est en grande partie due à l'absence de mise en œuvre des engagements pris au titre des accords antérieurs». Ils proposent donc la mise en place d'un «comité tripartite de suivi de la mise en œuvre de l'accord» composé des médiateurs, du gouvernement du Mali et des mouvements signataires de l'accord et qui assurerait «le suivi, le contrôle, la supervision, la coordination et l'application effective» de l'accord. Enfin, la communauté internationale propose de jouer «le rôle de dernier recours en cas de graves difficultés de nature à compromettre les objectifs» de l'accord. Réactions mitigées A la lecture de ce document, lundi soir, les parties maliennes ont réagi de manière différente. Les mouvements armés de la Plateforme d'Alger, la CMFPR, le Gatia et le MAA, considérés par certains observateurs comme proches de Bamako, ont affirmé en séance qu'ils approuvaient ce texte. En revanche, le MNLA, le HCUA, le MAA dissident et la CPA ont demandé plusieurs jours de réflexion pour faire part de leurs amendements, s'étonnant de ne voir aucune de leurs propositions retenues. Enfin, selon plusieurs participants, les représentants du gouvernement malien, visiblement mécontents de certaines propositions, ont accusé la médiation internationale de ne pas respecter la souveraineté du Mali. Une fois que chaque partie aura donné à la médiation ses propositions d'amendement, une nouvelle et ultime session de discussions sera prévue au Mali, à partir du 26 novembre, pour parvenir au texte final de l'accord.