Ingénieur en informatique depuis 2004, date à laquelle il obtint avec brio son diplôme, Mohamed Lamine Baâziz, major de promo et fierté du centre universitaire Larbi Ben M'hidi d'Oum El Bouaghi, ne pouvait être, après avoir été admis au centre universitaire de Constantine, mieux récompensé : il obtint avec mérite d'ailleurs une bourse de coopération. Quelle n'a pas été alors sa joie de pouvoir décrocher honorablement un ticket pour aller préparer un magistère ou un doctorat ! Il était prêt à aller jusqu'au bout du monde pour réaliser son rêve et réussir, mais il ne se doutait pas qu'on allait le prendre au mot pour lui désigner la Russie comme destination. Mohamed Lamine accepta, bien sûr sans rechigner. Tout en se préparant à aller y dépenser quelques roubles, il restait dans l'ignorance de cette roublardise qui allait se jouer de sa patience, engendrer tout son stress, le blaser, voire le désespérer ! Ainsi, après une année d'attente et tant de déplacements au bureau de coopération du ministère de l'Enseignement supérieur, il a dû se rendre à l'évidence, bien amère, qu'il lui fallait sacrifier encore une deuxième année et se suffire d'une réponse de bureaucrates assermentés ! Mohamed Lamine devait croire que la grande Russie restait froide quant à lui fournir l'aval nécessaire à son inscription ; réponse qui hélas lui a été servie à chaque fois bien chaude. Gardant la tête toute froide d'un major au chômage assuré, il n'a pas cessé d'acculer les hauts cadres en charge de la coopération au ministère de l'Enseignement supérieur, par la pertinente question : « N'y a-t-il pas d'autres universités ou pays pour accepter ma candidature, avez-vous vérifié ? » Niet, c'est bien à la roulette russe que se joue l'avenir du jeune prodige, il est invité à coopérer avec le bureau de la coopération, à attendre comme en Sibérie, à patienter et à vieillir sinon de quelques années. Notre jeune ingénieur aurait peut-être dû ne pas être major, ne pas nourrir d'ambitions et n'être la fierté de personne, il se serait fait alors l'épargne d'alerter aujourd'hui le ministre, le Président… Bien que désabusé au plus haut point par cette déplorable situation, Mohamed Lamine croit crânement qu'il est des gens sérieux qui prendront en charge cette année son avenir, celui de l'élite, enfin, celui du pays.