En 2009, Abdelaziz Bouteflika déclarait : «La mise en place prochaine des industries culturelles sera la base matérielle d'un essor sans précédent de la culture et de l'art dans notre pays.» Bien évidemment, rien n'a été mis en place depuis ! Alors que le Maroc, qui a fait de grands efforts en la matière, s'apprête à accueillir la Conférence sur les industries créatives en Afrique, l'Algérie n'a même pas encore adopté une stratégie pour le développement des industries culturelles, comme c'est le cas en Tunisie, au Burkina Faso ou encore au Mali. Principalement, deux obstacles liés à la nature du régime et à celle de l'économie empêchent tout développement de ces industries en Algérie. Premièrement, l'entrepreneuriat dans le secteur culturel a constitué, depuis l'indépendance, une vraie phobie pour les autorités qui ont tenté, par tous les moyens, de limiter son essor. Les secteurs culturels indépendant et privé sont souvent montrés du doigt en utilisant des arguments variés, allant de la lutte contre le capitalisme aux dangers des productions qu'ils génèrent sur les composantes identitaires de la nation. Cette tendance s'est particulièrement accentuée depuis le début des années 2000. Plusieurs mécanismes ont été instaurés pour contrôler la production cinématographique, l'édition ou encore le spectacle vivant. Ainsi, les livres et les scénarios sont soumis à des comités de lecture et les organisateurs de spectacle doivent avoir une licence octroyée au compte-gouttes. Deuxièmement, l'Algérie fonctionne selon un système économique basé sur la rente. L'accumulation de cette rente et sa distribution constituent, de ce fait, l'activité économique principale, chose qui rend factice l'objectif principal des économies de marché, à savoir générer des profits par la production et le rapport salarial. Ainsi, la rente est-elle un surplus d'origine extérieur au système productif qu'elle intoxique plutôt qu'elle ne dynamise de ses effets (re) distributifs. Comme l'ensemble des autres secteurs d'activité, les industries culturelles sont victimes de cette logique rentière. Leur développement, et par conséquent les surplus qu'elles peuvent générer, ne sont point une priorité. Par exemple, la priorité aujourd'hui pour un éditeur n'est pas de publier des livres de qualité et de les distribuer pour faire des profits, mais sa priorité est d'avoir la subvention la plus grande possible du ministère de la Culture.