L'agroécologie est une notion nouvelle qui allie la culture à l'environnement et, par extension, à la santé humaine. Elle peut raisonnablement se développer en Algérie. Face à la cherté des fruits et légumes, que les pouvoirs publics ne veulent ou ne peuvent pas arrêter, existe-t-il une alternative pour permettre aux citoyens une certaine autonomie. L'agroécologie ou la culture préurbaine peut constituer un moyen pour échapper aux griffes des barons du commerce maraîcher, qui agissent sans scrupule et qui prennent en otage les ménages vulnérables. Le principe est simple et l'idée a du potentiel. L'initiative est citoyenne et le projet est original. L'agroécologie, culture respectueuse de l'environnement et de la santé humaine, peut se développer en Algérie, à condition de médiatiser et de vulgariser le concept. Le collectif Torba s'attelle à diffuser la démarche. Créé il y a deux mois, il lance ses premières expériences, même si ses membres avaient par le passé mis en œuvre des projets similaires à titre individuel. Dans la pratique, il suffit qu'un groupe de citoyens prennent contact avec un agriculteur, ils concluent un accord et le payent au préalable pour produire une quantité de légumes ou de fruits sans utiliser de pesticides. Torba a pris attache avec des agriculteurs. Le premier projet-pilote a vu le jour à Ouled Fayet, et le second à Oued Serhane, dans le massif de Chrea. L'agriculteur, le noyau dur de l'initiative, est enthousiaste. Savoir que sa production trouvera preneur l'enchante, surtout lorsque l'on sait qu'il est l'élément le plus marginalisé du circuit de distribution actuel. Ainsi, ce contact direct, entre consommateurs et agriculteurs, réduira les influences négatives des mandataires, qui sont en ces temps, et dans la plupart des cas, peu scrupuleux. Maintenir l'activité paysanne Abdelkrim Rahal, membre du collectif Torba, traite le sujet plus globalement. «L'agriculture que nous défendons est une agriculture durable. L'aventure de l'agriculture chimique montre ses limites dans de nombreux pays. C'est pourquoi l'ONU et bon nombre d'acteurs veulent rééquilibrer et se réorienter vers l'agroécologie», affirme-t-il. Quant à l'application à grande échelle de l'initiative, il estime qu'«il faut d'abord réussir les expériences engagées, avant de songer à l'élargir». Plusieurs buts sont tracés par les promoteurs de l'agroécologie, et le collectif Torba en particulier. Outre que l'agroécologie participe au maintien de l'activité agricole et paysanne, en plus de la garantie de récolter des fruits et légumes de qualité non contaminés par les produits chimiques, la mission est d'ordre militant. L'agroécologie contribue à la préservation des produits du terroir, et à la sauvegarde des semences endémiques (type local). Tout un patrimoine matériel et immatériel est protégé, au bénéfice des générations futures. Une fois les légumes livrés par l'agriculteur, les protagonistes pensent à transformer les déchets en engrais naturel, via le procédé du compostage. D'ailleurs, Torba organise des ateliers de formation pour expliquer la technique. Après quelques semaines, l'engrais 100% bio est utilisé pour les cultures domestiques ou d'intérieur. Le compost peut offrir des débouchés intéressants si des jeunes se lancent dans cette petite industrie responsable et solidaire, afin de contrecarrer le marché des pesticides. Au final, dans l'agroécologie, l'agriculteur et ses clients deviennent des «consom'acteurs». Notons que l'agroécologie familiale a de tout temps existé en Algérie, et ce, depuis des millénaires.