Moins de trois mois après le déclenchement de la révolution de novembre 1954, la région de l'ex-Condé Smendou, actuellement Zighoud Youcef, dans la wilaya de Constantine, a été le théâtre du premier fait d'armes important des combattants de la zone 2, commandée par Didouche Mourad. La veille du mardi 18 janvier 1955, Didouche Mourad se trouvait à la tête d'un groupe de neuf moudjahidine au maquis de Douar Souadek, situé à 12 km de l'ex-Condé Smendou. Le maquis de Condé Smendou, de pénétration difficile, a été de tout temps un refuge pour les troupes des combattants de l'armée de libération. Selon la Dépêche de Constantine du mercredi 19 janvier 1955, un renseignement parvenu à la brigade de gendarmerie de l'ex-Condé Smendou sur la présence de ce groupe. Il faut savoir que les services français avaient aussi leur réseau d'informations dans la région. A l'aube du 18 janvier, une vingtaine de gendarmes français sous le commandement du lieutenant Malherbe se dirigèrent vers Douar Souadek. Arrivés sur les lieux, et en longeant l'oued Boukerker, ils furent pris en embuscade par les moudjahidine commandés par Didouche Mourad.dès les premiers échanges de coups, un gendarme français fut tué et un autre blessé. Peu de détails ont été révélés à ce jour sur les circonstances exactes de la présence du groupe des moudjahidine dans cette région, et le déroulement de cette bataille, ainsi que la mort de Didouche Mourad, l'un des membres du groupe des six ayant décidé le déclenchement de la lutte armée, et premier chef de zone (future wilaya 2 historique) à tomber les armes à la main. Il avait 28 ans. Selon les faits rapportés par La Dépêche de Constantine, la bataille commença vers 8h30 du matin. Voyant l'ampleur de l'engagement et la détermination des moudjahidine, le lieutenant Malherbe demanda des renforts. En fin de matinée, trois pelotons de gendarmerie sont arrivés de Constantine, Azzaba et El Harouch, suivis par deux compagnies de CRS. Un combat à armes inégales Dix courageux moudjahidine, munis de fusils et de pistolets, se sont retrouvés face à un contingent de gendarmes, lourdement armés. Alerté, le sous préfet de Constantine, Massoni s'est rendu sur les lieux pour le contrôle de l'opération sur place, en présence du colonel Terrasson, commandant de la subdivision de Constantine, le commandant Maffi-Berthier, commandant du groupement de la gendarmerie et le capitaine Billand. Profitant de cette supériorité, les forces de la gendarmerie française ont commencé par encercler les combattants qui se sont repliés dans le lit de l'oued Boukerker. Les hommes de Didouche Mourad montrèrent une résistance farouche. La bataille a été dure, de l'aveu même des responsables militaires français. Elle ne prendra fin que vers 17h15. Sept moudjahidine sont tombés les armes à la main dans le fonds de l'oued Boukerker. Un huitième a été grièvement blessé et deux autres se sont faits prisonniers. Le matériel de guerre saisi était composé de six fusils de fabrication italienne et anglaise, six pistolets automatiques, deux bombes artisanales et des munitions.L'opération de Condé Smendou a défrayé la chronique de l'époque et fut médiatisée à outrance par la presse de l'époque, notamment La Dépêche de Constantine. Cette dernière cite que les premiers éléments de l'enquête, menée par le commissaire principal Cayol, ont fait ressortir que le groupe dont les membres sont originaires de la région, était celui-là même qui, dans la nuit du 1er novembre, avait attaqué la caserne de gendarmerie de l'ex-Condé Smendou. Les sept martyrs tombés dans la bataille de Douar Souadek étaient identifiés. Il s'agissait de Bengharsallah Belkacem, Ayache Youcef, Abbes Bouchriha, Ali Belloucif, Mohamed Karboua, Ammar Naas, alors que le septième de la liste portait le nom d'Abdelkader, qui n'était autre que le nom de guerre de Didouche Mourad. En fin de soirée du 18 janvier 1955, le procureur de la République, Longobardi, le substitut Gravereau et le juge d'instruction Merquis, se sont rendus sur les lieux pour s'informer des résultats de l'information judiciaire. Le détail le plus important révélé par le rapport établi après cette opération demeure le fait que les autorités françaises n'ont jamais pu reconnaître la véritable identité de Didouche Mourad. Elles ignoraient qu'Abdelkader était le nom de guerre de Didouche Mourad. Ce même rapport note : «Aucun chef de bande notoire ne figure parmi les morts ou les prisonniers». La bataille de Douar Souadek a été un bel exemple de courage et de témérité donné par un petit groupe de moudjahidine. Le combat se poursuivra sous les commandes de Zighoud Youcef, adjoint de Didouche Mourad dans la zone 2.