Le secteur de l'informel, qui ne cesse de prendre de l'ampleur, «pourrait constituer à terme une menace sérieuse pour l'outil national de production et par conséquent risquerait de mettre en péril les fondements de l'économie nationale dans son ensemble», a averti hier le ministre du Commerce, Amara Benyounès. S'exprimant lors d'une journée d'information sur l'économie et le marché informel, organisée à l'hôtel El Aurassi à Alger, le ministre a relevé que «l'expansion de l'informel obéit à des objectifs occultes, à des motivations de gains faciles, d'enrichissement illicite et d'évasion fiscale». Pour le ministre, il est difficile de cerner avec «exactitude» l'ampleur de ce phénomène au regard de «sa nature occulte et de ses pratiques frauduleuses». L'informel affecte, selon lui, à des degrés différents plusieurs branches d'activité, notamment les services, le commerce extérieur, l'industrie de transformation, l'agroalimentaire, le cosmétique, les textiles et les cuirs, les matériaux de construction et l'agriculture. Citant l'exemple de la non-facturation, procédé très en vogue pour fuir l'impôt, le ministre a rappelé que les actions menées par les services de contrôle du ministère du Commerce ont permis la découverte d'opérations commerciales sans facture d'un montant global de 206,5 milliards de dinars au titre des quatre dernières années, soit une moyenne de 51,6 milliards de dinars par an. En dépit des efforts engagés par les pouvoirs publics en vue de lutter contre ce fléau, il n'en demeure pas moins que l'ampleur prise par l'informel, «ces deux dernières décennies, reste l'un des principaux obstacles à la stabilité et la transparence nécessaires à une relance économique soutenue et au développement de l'investissement productif», a encore ajouté Amara Benyounès, pour qui «de multiples entreprises, qui activent dans la légalité et dans le respect de la législation, se trouvent fortement menacées dans leur exercice par ce phénomène qui freine tout effort d'investissement productif». Tour à tour, des experts algériens ont mis en garde contre l'expansion dudit fléau, qui représente environ 40% du produit intérieur brut (PIB). Le marché informel monopolise d'ailleurs 45% de l'activité du commerce et des services, 37% du BTP et 17% de l'industrie, selon des chiffres avancés par Alliouche Rachid, maître de conférences à HEC-Alger. Ces statiques restent en revanche, selon lui, loin de la réalité tant le phénomène est tentaculaire. Maître de conférences à HEC-Alger, Allaouat Farid, a plaidé en faveur d'un traitement «politique» à travers la mise en place de mesures incitatives. D'après lui, tout traitement répressif risquerait de s'avérer un coup d'épée dans l'eau.