La ministre de la Culture, Nadia Labidi, a bien voulu répondre à nos questions après avoir assisté à la veillée funèbre de l'académicienne française organisée à Cherchell. Vous venez d'accompagner la dépouille de l'écrivaine Assia Djebar jusqu'à la ville de Cherchell. Certes, il est très tard, mais nous voulons connaître votre sentiment... En cette veillée, je me suis retrouvée avec la famille d'Assia Djebar. Cette veillée nous a réunis. Nous avons évoqué Assia Djebar. Nous avons parlé de ses romans, de toutes ses œuvres. Nous avons parlé de la nécessité de traduire ses romans en langue arabe. Nous avons évoqué surtout son souhait d'être enterrée ici à Cherchell. Cela avait été noté. J'ai parlé longuement avec la dame qui était restée avec Assia Djebar jusqu'aux ultimes moments de sa vie. Elle avait évoqué les souvenirs que l'écrivaine avait de Cherchell, de cette maison où elle se rendait avec ses cousines, enfin beaucoup de souvenirs et des moments vécus par Assia Djebar, ici à Cherchell, petite et jeune fille. Cette soirée a plus un caractère de recueillement, un caractère familial, puisque beaucoup de membres de la famille d'Assia Djebar se sont retrouvés autour d'elle.Cela s'est fait avec un sentiment de reconnaissance envers cette grande dame et aussi cette réflexion sur son souhait profond, qu'Assia Djebar avait exprimé, pour qu'elle soit enterrée ici à Cherchell. Ne trouvez-vous pas que l'Algérie ne lui a pas fait ce qu'il fallait de son vivant ? Vous savez, quand un être disparaît, on évoque toujours le fait que nous aurions pu faire plus pour lui de son vivant. C'est valable pour tous les artistes algériens quand ils disparaissent. On se dit peut-être que de son vivant, nous aurions dû être plus reconnaissants. Nous aurions dû lui manifester de la sympathie et de l'affection, comme tout le monde ce soir. Nous avons noté que les Cherchellois ont apprécié votre présence ici jusqu'à cette heure tardive avec la famille d'Assia Djebar, d'autant plus que vous avez accompagné la défunte depuis Alger jusqu'à Cherchell… Mais je tenais à le faire, parce que j'avais eu à superviser un film il y a 18 mois, en venant rencontrer la famille de la martyre Zoulikha Oudaï. Nous avions beaucoup parlé du roman La Femme sans sépulture écrit par Assia Djebar sur cette héroïne de la guerre de Libération nationale. En évoquant Assia Djebar d'ailleurs sur ce roman où elle avait évoqué à la fois les femmes du Chenoua, c'était comme s'il y avait une boucle qui se fermait autour de cette évocation des femmes du Mont Chenoua et de Zoulikha Oudaï.