Les nouvelles chaînes privées algériennes seront soumises à un contrôle sur leurs sources de financement. L'Autorité de régulation de l'audiovisuel (ARA), en cours d'installation, va, selon des sources informées, procéder à l'étude des dossiers d'agrément des chaînes de télévision avec pour premier point à examiner «Les moyens de financement», d'après un cahier des charges précis. L'ancien journaliste de l'ENTV Miloud Chorfi, président de cette Autorité, est en phase de constitution de son équipe avant de passer à la phase active, six mois après sa nomination. La liste des huit membres restants de cette Autorité, dont quatre nommés par les deux Chambres du Parlement, n'est pas encore finalisée. «Ne faites pas attention aux noms qui circulent ici et là. La liste est en cours d'élaboration», nous a-t-on dit. Les noms de Lotfi Cheriet, Lotfi Bouchouchi et Soraya Bouamama ont circulé ces dernières semaines dans certains cercles à Alger. Une fois les membres de l'ARA officiellement désignés par décret présidentiel, une assemblée générale sera organisée pour adopter un règlement intérieur et un organigramme. Dans la phase actuelle, Miloud Chorfi prépare les dispositifs techniques et administratifs de l'Autorité. Un cahier des charges, sur la base de la nouvelle loi sur l'audiovisuel, sera également élaboré ; il sera applicable à toutes les chaînes qui demanderont l'autorisation d'émettre en Algérie par diffusion satellite ou terrestre. Les projets recevables, d'après les mêmes sources, sont ceux qui se conforment aux conditions prévues par la loi et par le cahier des charges. L'Autorité de régulation de l'audiovisuel, installée rue Didouche Mourad, à Alger, n'étudiera dans une première phase que le dossier des cinq chaînes qui ont des «bureaux accrédités» à Alger par le ministère de la Communication, à savoir Echourouk TV, Ennahar TV, El Djazaïria, Dzaïr TV et Hoggar TV. Les chaînes Echourouk News, Laki, Dzaïr News et Hoggar News, créées respectivement par Echourouk, Ennahar, Dzaïr TV et Hoggar TV, ne sont pas concernées et resteront donc de droit étranger. Les cinq chaînes citées plus haut ne sont, pour rappel, ni agréées ni accréditées en Algérie ; elles sont autorisées à activer uniquement à travers leurs bureaux. Une fermeture du bureau entraînerait l'arrêt de diffusion, même si l'émission se fait à travers le satellite égyptien NileSat (seules Echourouk News et Dzaïr News sont aussi présentes sur le satellite européen Hotbird) à partir de plateformes situées dans les pays du Golfe, en Jordanie et en Suisse. D'où leur extrême vulnérabilité. Le mode de paiement des services satellite – probablement par exportation de devises dans des formes qui restent imprécises – sera mis à l'étude par l'Autorité que préside Miloud Chorfi. Il sera demandé aux responsables de ces chaînes d'expliquer ce mode de financement et de dévoiler l'origine des fonds qui leur permettent d'exister. La publicité, encore rachitique, ne peut pas supporter la masse salariale, l'achat du matériel (caméras, tables de montage, moyens d'éclairage, studios, véhicules…), le loyer des bâtisses abritant ces chaînes… L'agrément des nouvelles chaînes sera conditionné par la transparence en matière de financement, une fois les dossiers finalisés et étudiés. Certains chaînes, entrées en folle concurrence, commencent à sentir le poids de l'endettement (il se chiffrerait en dizaines de millions de dinars). Les personnels, souvent instables, perçoivent leurs salaires de manière irrégulière. Les méthodes de recrutement restent peu claires et les dispositions contractuelles parfois non respectées. Ennahar TV a lancé la chaîne Ennahar Aflam avant de la remplacer par Ennahar Laki (destinée aux femmes), alors qu'Echourouk s'apprête à lancer Al Bena, consacrée à la cuisine, avant le mois de Ramadhan. Les autres chaînes qui diffusent sans agrément et sans accréditation comme Al Bilad TV, Al Adjwa, El Watan TV – qui n'est pas la chaîne du journal El Watan – Numidia News, Samira TV, El Heddaf TV, Aurès TV, Djurdjura TV, KBC, Amana TV, Kawaliss TV, L'Index, Al Makam TV, Sahara TV, Salam TV… risquent d'attendre longtemps avant d'être agréées, cinq à six ans. Certaines chaînes resteront de droit étranger jusqu'à ce qu'elles se conforment de manière totale au cahier des charges de l'ARA. Il a été remarqué ces derniers mois que des chaînes ont changé à plusieurs reprises leurs fréquences sur satellite sans raison apparente, suscitant l'intérêt des sociétés qui détiennent les satellites. D'autres ont cessé d'émettre (comme Tassili TV, Wiam TV, Stade News) sans aucune explication, alors qu'Atlas TV a arrêté ses émissions suite à des pressions politiques. Les chaînes privées algériennes seront également rattrapées sur la question du respect des droits d'auteur et des droits voisins. Aucune chaîne nouvellement créée ne semble respecter l'obligation de verser des droits d'auteur à l'ONDA après diffusion de musique, images, jingles ou supports vidéo. Le directeur de l'ONDA, Sami Bencheikh El Hocine, a déclaré récemment qu'il avait saisi par écrit les responsables des chaînes pour leur demander de payer les droits d'auteurs, mais qu'il n'a eu aucune réponse. Certaines diffusent des films de cinéma sans verser aucun sou aux producteurs étrangers détenteurs des droits, ce qui peut entraîner un décrochage du satellite, les sociétés gérant ces satellites étant obligées de se conformer à la législation internationale, très stricte en la matière. Le dossier de la propriété intellectuelle et industrielle, ce qui sous-entend les droits d'auteur, est l'un des facteurs bloquant les négociations actuelles entre l'Algérie et l'Organisation mondiale du commerce (OMC).