Avec un peu d'imagination et une vue en 3D, on pourrait comparer l'Algérie à une poche. Plus ou moins ronde, plus ou moins grande, une poche complexe qui comporte elle-même plusieurs poches, poches secrètes, poches privées, la poche des autres et plusieurs types de poches, celles-ci étant toutes alimentées par une poche géante trouvée dans le sous-sol du Sud, emplie d'un combustible fossile tout noir qui comble les caisses de l'Etat et permet, entre autres, à de grands nationalistes de posséder des appartements et des agences immobilières à Paris. D'où le terme «empocher» qui signifie mettre en poche, ce qui libère les mains, vides et tendues vers le haut en signe d'innocence. Car la poche est fermée et, en théorie, personne ne peut y accéder ; elle possède même une fermeture-éclair qui ne s'ouvre que sur décret présidentiel. Bien sûr, de petits malins ont réussi à y placer des pailles pour siphonner l'intérieur, pendant que d'autres petits espiègles qui n'ont pas accès au pouvoir sont arrivés à faire de petits trous dans cette poche, phénomène qu'on appelle le marché parallèle. Ce qui explique que cette poche n'est plus aussi grande qu'avant et diminue de volume, inquiétant tous ceux qui s'alimentent directement de cette poche. Heureusement, depuis quelque temps et dans sa suprême intelligence, le gouvernement a décidé de mettre la main à la poche et de créer une nouvelle poche pour compenser le dégonflement de la première. Il a appelé ça le décollage économique et l'a confiée à un homme, un privé entrepreneur qui, selon ses opposants, s'est rempli les poches avec des marchés publics de gré à gré, faisant des routes qui ne tiennent pas la route. C'est un problème topologique. Pourquoi confier cette mission de créer une nouvelle poche à quelqu'un qui, paradoxalement, a toujours fait le contraire, c'est-à-dire des trous dans les routes ? Le trou, justement, est le contraire d'une poche.