La cité antique syrienne de Palmyre est désormais contrôlée par les combattants de l'Etat islamique. Les forces gouvernementales ont abandonné les lieux en évacuant les derniers civils. Les ONG craignent la destruction des joyaux archéologiques. Les djihadistes du groupe Etat islamique (EI) se sont emparés, hier, de la totalité de la cité antique de Palmyre dans le désert syrien. Le groupe extrémiste contrôlant désormais la moitié du territoire syrien suscite l'inquiétude pour ses trésors archéologiques. «Les combattants de l'EI sont dans toutes les parties de Tadmor (nom arabe de Palmyre), y compris près du site archéologique» a d'ailleurs affirmé Rami Abdelrahmane, directeur de l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH). De son côté, Mohammad Hassan Al Homsi, un militant originaire de Palmyre, a déclaré : «Les troupes du régime se sont effondrées et se sont retirées de toutes leurs positions sans résistance.» Selon l'OSDH, les troupes du régime syrien ont quitté toutes leurs positions à la périphérie de Palmyre. Une information confirmée par M. Rami, qui a confié que «la plupart se sont retirées vers la ville de Homs», chef-lieu de la province centrale dont fait partie Palmyre. Le régime a d'ailleurs reconnu sa défaite, l'agence officielle Sana affirmant que les troupes loyalistes «se sont retirées après (...) l'entrée d'un grand nombre de terroristes de l'EI». Par ailleurs, toujours selon l'OSDH, le régime a transporté les détenus, en majorité des insoumis et des déserteurs, vers d'autres prisons. Après huit jours de combats, c'est sur le réseau social twitter que l'EI a revendiqué la prise totale de la ville. En effet, les djihadistes ont affirmé que les forces loyalistes «se sont enfuies, laissant derrière eux un grand nombre de morts dans leurs rangs». Ainsi, l'OSDH assure qu'avec la prise de Palmyre — stratégique pour l'EI car elle ouvre sur le grand désert syrien limitrophe de la province d'Al Anbar, en Irak — l'EI contrôle «désormais plus de 95 000 km2 en Syrie, soit 50% du territoire du pays». De plus, suite à la prise de deux champs gaziers près de Palmyre, le groupe a désormais en sa possession la quasi-totalité des champs pétroliers et gaziers de Syrie. Le régime, quant à lui, ne détient plus que le champ de Chaer, dans la province de Homs, tandis que les forces kurdes contrôlent des champs de Ramilane, dans la province de Hassaké, dans le nord-est. Par ailleurs, le contrôle de l'EI sur cette ville laisse craindre pour le sort de ses célèbres ruines, connues pour leurs colonnes romaines torsadées et leurs tours funéraires. Héritage Ainsi, Palmyre devrait, elle aussi, subir le même sort que l'Irak où le groupe avait détruit plusieurs statues et objets de valeurs dans des cités antiques. A cet effet, Irina Bokova, la directrice de l'Unesco, a déclaré hier que la destruction de la cité antique de Palmyre serait «une énorme perte pour l'humanité» car il s'agit du «berceau de la civilisation humaine appartient à l'humanité toute entière». En effet, c'est sur une vidéo postée par l'organisation internationale qu'Irina Bokova a déclaré : «Palmyre est le site d'un extraordinaire héritage mondial dans le désert. Toute destruction à Palmyre serait non seulement un crime de guerre, mais aussi une énorme perte pour l'humanité.» Cette dernière a d'ailleurs réitéré son appel au Conseil de sécurité de l'ONU afin que ce dossier soit correctement étudié et pris en charge dans les plus brefs délais : «Nous avons besoin que le Conseil de sécurité, que tous les leaders politiques, que les chefs religieux lancent un appel pour prévenir ces destructions.» De son côté, Maamoun Abdoulkarim, chef du service des antiquités syriennes, a assuré que des centaines de statues avaient déjà été mises à l'abri et a demandé à l'armée syrienne, à l'opposition et à la communauté internationale de sauver le site. «Les nouvelles sont très mauvaises, (...), il y a de très violents combats», a-t-il déclaré à Reuters. «Nos craintes concernent désormais le musée et les grands monuments qui ne peuvent être déplacés», a-t-il précisé. Le week-end dernier, les djihadistes de l'EI avaient pénétré sur le site classé au patrimoine mondial de l'Unesco, mais avaient rapidement été repoussés par les forces gouvernementales. Pour Matthew Henman qui dirige le Jane's Terrorism and Insurgency Center, «la capture de Palmyre laisse le champ libre à l'Etat islamique au moment où le gouvernement d'Al Assad est livre des batailles cruciales dans le nord (Alep et Idlib/Lattaquié) au Sud (Deraa et Damas)». Depuis le début de l'offensive de l'EI le 13 mai, la bataille dans Palmyre et ses environs a fait au moins 462 morts, selon un bilan de l'OSDH, dont 71 civils pour la plupart exécutés par l'EI, 241 membres des forces du régime et 150 djihadistes.