On ne comprend absolument rien à la diplomatie algérienne. L'Arabie Saoudite, qui blackliste notre pays parmi ceux qui ne luttent pas assez contre le blanchiment d'argent et financent le terrorisme, n'a provoqué qu'une réaction molle, inconsistante, faible et pusillanime. Notre ministre des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, a préféré commenter le fait que l'information soit répercutée par la presse, sans un mot sur la décision prise par le royaume wahhabite. Pour lui, les informations rapportées par certains médias ne sont qu'«une tempête dans un verre d'eau sans fondement aucun». Lamamra a rappelé, au terme d'une audience accordée jeudi dernier à la présidente de l'Assemblée nationale de la République serbe, Maja Gojkovic, que l'Algérie «a actualisé» ses lois en la matière, précisant que «du point de vue technique, des rapports sont adressés au GAFI». «Du point de vue technique, ce groupe international rend publics des bulletins et recommande aux institutions bancaires de faire preuve de vigilance avec certains pays qui n'ont pas encore adapté leur législation», a poursuivi M. Lamamra. Et d'ajouter que l'«Algérie l'avait fait à travers l'enrichissement de ses lois et la mise en place de mécanismes qui veilleront à leur application». Avant le chef de la diplomatie algérienne, c'est le porte parole du ministère des Affaires étrangères qui avait indiqué, mercredi, dans une déclaration à l'APS, «en réaction à ce qui a été relayé par certains médias avec exagération et imprécision, voire parfois désinformation», sur la prise en charge par les institutions algériennes spécialisées du dossier de prévention du blanchiment d'argent et du financement du terrorisme, que ce dossier «figure en tête des engagements internationaux de l'Algérie. Il n'est pas de nature à être traité à un niveau bilatéral avec aucun pays arabe ou autre». Aucun des deux responsables n'a osé aller au-delà des explications techniques pour prouver que l'Algérie est un bon élève qui a bien rempli ses engagements internationaux ni fait référence à l'Arabie Saoudite qui n'est d'ailleurs pas à son premier écart envers notre pays. Si nul ne s'attendait à ce que ce pays, dont le financement du terrorisme islamiste et la propagation de sa matrice idéologique, le wahhabisme, sont bien réels, s'érige en donneur de leçons, l'on ne comprend pas cependant la passivité de la diplomatie algérienne, qui courbe l'échine devant un pays qui ne rate aucune occasion pour faire preuve d'inimitié envers l'Algérie qui n'a pas cautionné les attaques contre le Yémen. L'Arabie Saoudite le fait savoir à chaque fois que c'est possible. En avril dernier, c'est un avion d'Air Algérie, parti rapatrier nos compatriotes au Yémen, qui s'est vu, en dépit de toutes les autorisations, interdire de survoler le ciel saoudien. La mission aurait pu tourner au drame. Et le dénouement de la crise a mis du temps pour intervenir. Mais au lendemain de la publication du témoignage du pilote dans le journal El Watan, on a eu droit à un démenti du ministère des Affaires étrangères. «Les propos sur un prétendu malentendu sont dénués de tout fondement, car le rapatriement du Yémen de nos nationaux s'est effectué en parfaite et totale coordination entre l'Algérie, l'Arabie Saoudite et les autres pays concernés», avait dit Abdelaziz Benali Cherif dans une déclaration à APS. Le commandant de bord n'aurait pas tout de même inventé une telle histoire ! La réalité est que l'Algérie a tout fait pour minimiser ce qui aurait pu être un véritable incident diplomatique. Pourquoi notre diplomatie a-t-elle fait le choix de calmer le jeu devant un pays qui a fini par revenir à la charge en classant l'Algérie sur la liste noire des pays qui «luttent mal contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme» ? Les observateurs arrivent mal à expliquer une telle posture de frilosité. Saïd Rabia