Le représentant des Nations unies pour la Libye, Bernardino Leon, est parvenu, hier à l'aube à Skhirat, au Maroc, à arracher un accord de la part des principales factions libyennes, sur ses dernières propositions pour la sortie de crise en Libye. «C'est un premier pas vers la finalisation de la transition politique et l'édification d'une Constitution permettant l'accès à la démocratie», a souligné M. Leon. Et d'insister sur le fait que «la porte reste ouverte à ceux qui sont absents aujourd'hui», et en faisant miroiter aux absents que «jamais un accord n'est définitif et qu'il peut faire l'objet de rectifications». La dernière proposition de Bernardino Leon a été signée, en premières lettres, par la délégation du Parlement de Tobrouk, ainsi que par les représentants des députés réfractaires, notamment ceux de Misrata. Etaient présents, pour valider cet accord, les maires des principales villes libyennes, à l'image de Tripoli, Benghazi, Sebha, Misrata, Zliten et Ajdebia, ainsi que les représentants des deux principaux partis politiques : l'Alliance des forces nationales de Mahmoud Jibril et le parti de la Justice et de la construction, bras politique des Frères musulmans. Depuis mardi dernier, il était clair que le Congrès national général n'était pas d'accord sur le dernier projet, présenté par M. Leon. Le communiqué publié suite à la discussion du Draft 4 (modifié) a insisté sur «la nécessité de respecter le jugement de la Cour suprême et les procédures pour la nomination du chef de l'état-major des armées». Il était clair que le Congrès national général de Tripoli ne voulait pas être traité sur un pied d'égalité avec le Parlement de Tobrouk. «Or, M. Leon essayait, certes, de rapprocher les points de vue. Mais, il gardait dans la tête le fait que le Parlement de Tobrouk est le corps légitime, aux yeux de la communauté internationale», remarque, Abderrahman Dibani, membre du congrès. Il reproche à l'émissaire de l'ONU «d'ignorer le fait que la Cour suprême libyenne ait annulé les résultats des élections du 25 juin 2014». Hier, le Congrès national général a envoyé une nouvelle lettre à Bernardino Leon, exprimant «sa disponibilité à retourner au dialogue, si les modifications qu'il a présentées dans sa dernière lettre sont validées». Le danger Daech Par contre, le représentant du Parlement de Tobrouk, Mohamed Chaïeb, a insisté après la signature de l'accord en disant : «Cela annonce la fin de la scission des institutions en Libye et l'orientation vers une réconciliation nationale sans vainqueur ni vaincu.» Même son de cloche de la part du représentant des députés réfractaires, le représentant de Misrata, Fathi Bach Agha, qui a considéré que «cet accord signifie que la solution ne peut jamais venir d'un seul bord et que l'apport de tous est nécessaire pour reprendre en main l'avenir de la Libye». Il est à souligner que Bach Agha et le maire de Misrata ont signé, malgré leurs réserves par rapport à la nomination de la hiérarchie militaire, laissée aux mains du Parlement, qui risque de maintenir le général Haftar à sa place, cela pourrait soulever l'animosité de la région ouest. Par ailleurs, cet accord a été favorablement accueilli par la communauté internationale. Ainsi, les ambassadeurs des pays (5+5) ont publié un communiqué, repris sur la page facebook de l'ambassade des Etats-Unis en Libye, où ils «approuvent la responsabilité et le courage de ceux qui ont franchi ce pas et appellent les hésitants à les suivre». Ce communiqué émanant des ambassades de l'UE, Canada, France, Allemagne, Italie, Portugal, Russie, Espagne, Grande-Bretagne et Etats-Unis, suite à une réunion tenue à Skhirat en marge de l'avancement du dialogue entre les factions libyennes. Il reste maintenant de savoir comment cet accord va être perçu sur le terrain, où les combats font toujours rage du côté de Benghazi entre les troupes du général Haftar et celles proches de Daech. Autour de Syrte, les troupes de Daech essaient de renforcer leurs positions. Elles ont avancé d'un rayon de 60 km vers l'Ouest (Misrata), l'Est (les zones pétrolifères) et le Sud. La ville de Misrata n'est pas à l'abri d'une éventuelle attaque. Elle a déjà fait l'objet, la semaine dernière, de deux attentats-suicide. La partie est loin d'être gagnée.