Des changements qui n'ont toujours pas livré leurs secrets. Et en l'absence d'une communication officielle, il est aujourd'hui difficile – voire impossible – de comprendre le sens réel de ces chamboulements. Pour comprendre un tant soit peu cette volonté qu'on prête au président Abdelaziz Bouteflika de reconfigurer les Services secrets, un petit rappel des faits s'impose. Nous sommes à l'été 2013. Le chef de l'Etat rentre d'un long séjour médical à Paris. Des informations contradictoires circulent sur son état de santé. Puis, soudain, des décisions importantes sont annoncées. Le puissant colonel Faouzi, directeur de l'information auprès du DRS, est limogé. Les raisons ? On n'en saura jamais rien. Mais ce qui va suivre va sonner l'opinion. Le général Bachir Tartag, directeur de la Sécurité intérieure, est démis de ses fonctions. L'homme, qui sera remplacé durant deux années par le général Ali Bendaoud, est appelé, des mois plus tard, à la présidence de la République. Son remplaçant, lui aussi, sera limogé deux ans plus tard, en juillet dernier. Plus que les limogeages de hauts responsables, la présidence de la République dépouille, en quelques jours, le DRS de services aussi importants que névralgiques que sont la communication et la police judiciaire, qui seront directement rattachés à l'état-major de l'armée. L'opération de «transfert» des différentes directions s'est récemment achevée avec la dissolution du service de l'Intelligence économique du DRS. Auparavant, le puissant GIS (groupe d'intervention spéciale), corps d'élite spécialisé dans la lutte contre le terrorisme, a été dissous. Ses éléments, des militaires surentraînés, sont dispersés, affectés à d'autres services de l'armée. Dans un geste que beaucoup d'observateurs interprètent comme une déclaration de guerre du clan Bouteflika au chef du DRS, la présidence de la République suspend, en mars 2014, le général Hassan, responsable de la lutte antiterroriste au sein de ce département. Et comme pour ajouter un nouveau chapitre à ce puzzle qui s'écrit autour des Services secrets algériens, l'homme est mis aux arrêts fin août dernier. En deux années, la présidence de la République a donc réussi l'incroyable prouesse de changer complètement la configuration du DRS. Il ne reste de cet énigmatique service que son mythique patron, le général Toufik, dont les Algériens connaissent très peu de choses. Il est même en passe de pulvériser le record du monde de longévité à la direction d'un service sensible : 25 ans à la tête du DRS. En l'absence d'indications officielles qui montrent la direction que la présidence veut donner au DRS, les spéculations vont bon train. Et l'hypothèse qui sort du lot est celle qui veut que ces changements sont loin de répondre à une logique de réforme, comme on pourrait le supputer. Ils ont l'apparence d'un résultat des luttes acharnées que se livrent deux clans du pouvoir. L'absence de débat public et de transparence accrédite cette hypothèse.