Le cancer bronchique a été l'un des thèmes abordés lors des 21es Journées médico-chirurgicales organisées, mercredi et jeudi, au CHU Nedir Mohamed de Tizi Ouzou. Plusieurs praticiens venus notamment d'Alger, Oran, Blida, Sidi Bel Abbès et de la région hôte étaient présents. Selon le diagnostic établi par des spécialistes, cette pathologie est la première cause de mortalité chez l'homme et devient un problème de santé publique en Algérie du fait de son incidence en augmentation et de l'impact de sa prise en charge. Outre les communications spécialisées, une table ronde était également au programme de cette rencontre scientifique de haut niveau. Une occasion pour faire le point sur tous les aspects liés à cette maladie, l'épidémiologie en Algérie et plus particulièrement en Kabylie et les facteurs favorisant leur survenue. La radiologie, élément-clé dans l'exploration des patients, la chirurgie qui reste à l'heure actuelle le meilleur traitement du cancer bronchique ont été parmi les points traités. Abordant le cancer bronchique du sujet âgé, le Dr Ihadjadene (service pneumo-phtisiologie du CHU de Tizi Ouzou) a expliqué que celui-ci pose des problèmes particuliers aussi bien du point de vue diagnostic que thérapeutique. Se basant sur une étude rétrospective descriptive des dossiers des patients âgés de plus de 65 ans hospitalisés dans son service durant les années 2012-2013, elle fait ressortir que 56,25% d'entre eux sont fumeurs, 2,25% victimes de tabac passif, et 6,25% non fumeurs. Les personnes actives sont les plus touchées (50%) contre 12,5% chez les chômeurs. Co-morbidités constatées (maladies qui en accompagnent souvent une autre) : hypertension artérielle et cardiopathie (43,75%), diabète (25%), tumeur vésicale (12,5%), sang (31%). L'âge chronologique ne reflète pas l'âge physiologique pour tous les patients selon elle, ajoutant que la fragilité augmente avec l'âge. «La prise en charge du cancer bronchique est le plus souvent ambulatoire, l'hospitalisation est rarement indiquée, plusieurs cancers diagnostiqués et orientés pour une prise en charge thérapeutique n'ont pas été inclus dans nos séries ; il est donc très difficile d'apporter des conclusions objectives». Une certitude, le tabac reste le premier facteur de risque. «La lutte anti-tabac reste le meilleur moyen de diminuer la fréquence du cancer bronchique. Une exposition professionnelle est à rechercher automatiquement, car retrouvée chez plus de la moitié de nos patients : fonderie, industrie auto, mines, biomasse. Des co-morbidités telles que la Bpco, le diabète, l'HTA, les cardiopathies, conséquences de l'intoxication tabagique, assombrissent le pronostic et rendent plus difficile la prise en charge thérapeutique. Pour une meilleure prise en charge du cancer bronchique du sujet âgé, il est nécessaire de se donner les moyens de diagnostic (sous-diagnostic = sous-traitement)», recommande le Dr Ihadjadene. Selon les indications fournies par le Dr Zine-Charaf Amir Tidadini, du service de pathologie du CHU Mustapha (Alger), 70% des cancéreux bronchiques sont au stade avancé de la maladie au moment de leur décès. Le Dr Baïk Zakia (CHU de Tizi Ouzou) a, dans son exposé, étudié la tendance évolutive des tumeurs broncho-pulmonaires dans la wilaya de Tizi Ouzou de 1997 à 2009. Elle a identifié les caractéristiques épidémiologiques des patients atteints par ces tumeurs via un constat comparatif avec d'autres régions du pays. Les données sont recueillies par l'équipe du registre des tumeurs à partir de comptes rendus d'anatomopathologie au niveau des laboratoires publics et privés des wilayas d'Alger, Blida, Boumerdès, Tipasa et Tizi Ouzou et sur la base des dossiers médicaux colligés des patients hospitalisés dans ces wilayas. Sur une période de 13 ans (1997-2009), il a été enregistré dans la wilaya de Tizi Ouzou 12 180 nouveaux cas de tumeurs broncho-pulmonaires, soit un taux de 7,5%. Selon la même source, la pathologie cancéreuse du poumon touche aussi bien l'homme que la femme avec une prédominance masculine (88,4%). La pathologie cancéreuse a occupé une place de plus en plus importante dans cette wilaya durant cette période avec 12 180 cas enregistrés, dont 923 cas de tumeurs broncho-pulmonaires (4e position après le cancer du système réticulo-endothélial, le colorectal et le cancer du sein). En Algérie, le taux d'incidence du cancer est passé de 80 cas pour 100 000 habitants en 1993 à 125 cas/ 100 000 h en 2010. Le cancer broncho-pulmonaire représente le premier cancer chez l'homme et la cause la plus fréquente de décès par cancer. La pathologie survient chez les sujets de plus en plus jeunes. Le taux de mortalité est très élevé, car c'est un cancer très agressif. Le taux de survie après 5 ans varie entre 1% à 5%, avec une survie médiane de 9 à 20 mois. La surveillance de ces cas de tumeurs est réalisée par la mise en place de registres de tumeurs dans différentes régions du pays, dont celui de Tizi Ouzou, a-t-elle affirmé. Les cancers broncho-pulmonaires occupent une place considérable par rapport aux autres tumeurs dans la wilaya de Tizi Ouzou. Ils viennent en première position chez l'homme chez qui les taux d'incidences évoluent vers une augmentation. Comparés aux résultats d'autres registres du pays, les taux retrouvés se présentent comme suit : Tizi Ouzou (14,5% en 2008), Oran (14,2% en 2001), Sétif (96% en 2005), Alger (15,3% en 2008). «Les tumeurs broncho-pulmonaires occupent la première place parmi les autres localisations, c'est pourquoi il faut axer nos efforts sur la prévention en agissant sur les facteurs de risque connus (tabac et alcool) par le biais de campagnes d'information, éducation-communication et de sensibilisation», suggère le Dr Baïk Zakia. Dans une autre communication, le Dr Z. C. Amir du CHU Mustapha alerte sur la progression de cette pathologie qui représente, dit-elle, un problème de santé publique, précisant que c'est la première cause de mortalité dans le monde et en Algérie.