La situation économique se dégrade à tel point que les prévisions d'encadrement budgétaire et les mesures prises par le gouvernement dans le cadre de la loi de finances 2016 s'avèrent d'ores et déjà insuffisantes. Comment peut- il en être autrement lorsque la cadence des alertes pessimistes du gouverneur de la Banque d'Algérie — qui n'est pas connu pour le maniement de la langue de bois — s'accélère au fil de la dégradation de la situation économique du pays qui voit ses ressources s'amenuiser au fur et à mesure que le baril du pétrole se déprécie sur le marché mondial ? Hier, Mohamed Laksaci a monté de plusieurs crans ses alertes, à la faveur de la présentation de la note de conjoncture préparée par son institution, pour confirmer l'ampleur du choc externe que subit l'économie algérienne dans le sillage de la chute des prix du pétrole qui a perdu plus de 60% de sa valeur depuis juin 2014. Les recettes en nette baisse qui mettent tous les indicateurs macroéconomiques du pays au rouge et creusent le déficit budgétaire au-delà des prédictions les plus alarmantes, sonnant le glas de la parade imaginée par le gouvernement. En annonçant des tendances monétaires et financières enregistrées au cours des neuf premiers mois de l'année 2015, Mohamed Laksaci insiste notamment sur le creusement du déficit budgétaire et l'érosion des ressources du Fonds de régulation des recettes (FRR) dont le solde se hissait à peine au-dessus de 28 milliards de dollars en septembre 2015. Une détérioration accélérée des indicateurs macroéconomiques qui risque de se poursuivre en 2016 des suites de la baisse drastique des revenus du pays, tirés d'un baril de pétrole en glissement effréné ces derniers mois. Hier, il a même chuté — au moment même où M. Laksaci égrenait les mauvaises nouvelles accumulées depuis quelques mois — en dessous de 35 dollars le baril, un seuil jamais atteint depuis juillet 2004. Des mauvaises nouvelles qui s'amoncellent à un rythme effréné et qui risquent d'annuler toutes les anticipations budgétaires du gouvernement qui a notamment maintenu un baril de référence de 37 dollars le baril dans la loi de finances 2016, ce qui risque de l'amener à revoir sa copie lors d'une LFC 2016 qui s'avère d'ores et déjà incontournable. Le gouvernement aura aussi le loisir de recourir à l'application répétée et accélérée de l'article 71 de la LF 2016 qui permet au gouvernement de rédiger des décrets d'ajustement pour l'annulation de crédits préalablement votés dans le cadre de la loi de finances lorsque les équilibres budgétaires sont compromis. L'Exécutif n'aura d'autre choix que de mettre entre parenthèses certains projets pour en privilégier d'autres. Des secteurs entiers risquent de se voir ainsi dépouillés de leur budget, si l'on s'en tient à l'explication donnée par le ministre des Finances pour justifier l'introduction de l'article 71 dans la LF 2016. Le gouvernement envisage en effet, en vertu de cette disposition, de collecter les ressources au profit de projets qu'il jugera prioritaires et nécessaires au détriment d'autres moins stratégiques à ses yeux. La gravité des informations collectées par la Banque d'Algérie concernant les indicateurs macroéconomiques du pays rend, par ailleurs, quasi insignifiantes les augmentations mises en application par le gouvernement concernant notamment le carburant, le gaz et l'électricité. Des augmentations qui vont grever le budget des ménages, sans nécessairement constituer un quelconque rempart contre l'érosion accélérée des ressources de l'Etat.