Motif fréquent de consultation dans les services de rhumatologie, le mal de dos constitue aujourd'hui une des angoisses de nombreux algériens. Une maladie du siècle qui tend à se propager à toutes les franges de la société : femmes, hommes, vieux, jeunes et moins jeunes. Lombalgies, lumbagos, sciatiques, hernies... sont autant de maux décrits et rapportés. Le mal de dos, expliquent les spécialistes, s'installe le plus souvent rapidement en quelques mois et n'est pas sans conséquences sur la vie courante des personnes souffrant de ce mal. Des douleurs qui engendrent automatiquement l'immobilisme, la peur de bouger, puis des difficultés professionnelles et psychologiques. Ce qui risque dans certains cas de devenir chronique, voire l'installation d'une invalidité avec toutes les conséquences sur la vie familiale et sociale. Le port répété de charges, les efforts multipliés pour soulever les choses augmentent le risque de survenue des lombalgies, d'où l'importance de prévention de ces risques en éduquant son corps et en adoptant les bons gestes dès le plus jeune âge en pratiquant un sport pour maintenir sa bonne santé. «Le changement dans le mode de vie des personnes où la sédentarité a remplacé dans une large mesure l'activité, la transition épidémiologique sont autant de facteurs qui expliquent aujourd'hui l'augmentation des maladies non transmissibles (maladies cardio-vasculaires, l'hypertension artérielle, le diabète, le cancer du sein et du colon, etc.) qui sont en cause dans 60% des décès dans le monde. Les lombalgies, le mal de dos figurent également parmi toutes ces maladies», souligne le Pr Rachid Hanifi, ex-chef de service de la médecine du sport à l'Etablissement hospitalier spécialisé de cardiologie de Clairval, et président du comité national pour l'activité physique et santé au sein du comité national de la prévention des maladies transmissibles au ministère de la santé, et de rappeler que l'OMS a plaidé pour un programme de prévention contre les maladies non transmissibles, dont ce mal du siècle. La lutte contre la sédentarité, un facteur de risque majeur de toutes ces maladies, est l'une des conditions d'amélioration de la qualité de vie des personnes atteintes de ces pathologies et leurs complications. «L'activité physique présente des avantages importants pour la santé et contribue à prévenir les MNT», soutient le Pr Hanifi avant de préciser que l'activité physique réduit de 30% les maladies cardio-vasculaires et leurs complications tout en réduisant de 60% les récidives. Comme elle contribue également à réduire de 40% le cancer du colon et de 25 à 30% le cancer du sein. Il est donc important, a-t-il souligné, d'intervenir sur les facteurs de risque en premier lieu, agir en prévention secondaire pour éviter que la maladie s'installe, et en dernier lieu éviter les complications. C'est pourquoi le Pr Hanifi estime qu'il est important d'intégrer l'activité sportive dans les programmes de prévention pour prémunir la société des maladies chroniques : «D'où le concept sport/santé qui est aujourd'hui adapté à travers le monde, tout en mettant en place des programmes spécifiques, que ce soit pour les personnes malades ou les personnes saines». D'autant que, signale le Pr Hanifi, 80% des cas du mal de dos sont d'origine mécanique, il s'agit de contracture musculaire de défense. «Avec l'installation de la sédentarité et le manque d'activité, les muscles ont perdu de leur dynamisme et ils ne peuvent plus jouer leur rôle de charpente pour la colonne vertébrale. Les charges externes sont donc supportées par le squelette, ce qui conduit à une usure précoce des cartilages vertébraux, le tassement des vertèbres et un processus arthrosique précoce, voire même à des hernies discales», a-t-il expliqué tout en précisant que des moyens de traitement existent et l'immobilisation est désormais proscrite ; on parle aujourd'hui d'«écoles du dos», et le premier centre vient de voir le jour en Algérie et dont il est l'initiateur. Le traitement de ces lombalgies et autres douleurs de dos se traduisent par la correction posturale et un apprentissage des gestes de la vie quotidienne (comment porter les choses, comment se lever, se baisser, etc.). «Dans ce type de centre, on apprend au patient à contribuer à sa prise en charge tout en lui expliquant ce qu'il faut faire. Il s'agit d'une éducation sanitaire pour lui éviter des gestes inappropriés, et ensuite le traiter par l'activité physique adaptée à chaque cas. Il est donc question d'expliquer le pourquoi du mal après avoir établi une évaluation de l'état de santé et de la condition physique du postulant à l'activité physique et au sport. L'élaboration d'un programme d'exercice physique à cet état de santé, elle, doit être préventive pour justement atténuer la douleur et éviter les récidives», a-t-il encore expliqué tout en plaidant pour la prescription médicale de l'activité physique. «Il s'agit d'un complément thérapeutique et elle est un moyen de prévention de certaines maladies. Ce qui doit normalement être soutenu par la sécurité sociale afin de réduire, de son côté, les dépenses faramineuses dans la prise en charge de certaines pathologies évitables par le sport et d'encourager la pratique physique en entreprise afin d'améliorer la performance physique qui permettra de réduire l'absentéisme provoqué souvent par ces maux de dos», a-t-il indiqué. Le Pr Hanifi lance un appel pour le développement du sport en entreprise et au sein des collectivités locales. Préconiser des parcours «santé» et des salles de réadaptation au sein des hôpitaux est également une des mesures qui contribuerait à la réduction de la durée d'hospitalisation.