La suspension, pour une durée de 4 ans, du président et du bureau fédéral (élus) de la Fédération algérienne d'athlétisme (FAA), par le ministre de la Jeunesse et des Sports (MJS), Yahia Guidoum, a suscité, bien sûr, une réaction de l'International Association of Athletics Federations (IAAF). Dans une correspondance (dont El Watan détient une copie) adressée au ministre de la Jeunesse et des Sports, le 13 septembre 2006, le président de l'IAAF, le Sénégalais Lamine Diack, souligne : « J'ai reçu une copie de votre communiqué du 5 septembre 2006 portant suspension pour quatre ans du président et des membres du bureau de la fédération (FAA) et annonçant la nomination d'un directoire chargé de gérer la période transitoire conduisant à une assemblée générale élective dans les 30 jours. Il paraît que les membres suspendus n'ont même pas eu la possibilité de prendre connaissance du dossier et de répondre aux griefs articulés contre eux. Vous me permettrez donc de vous faire savoir que l'IAAF ne reconnaîtra pas une structure mise en place en violation des dispositions statutaires approuvées par son conseil, d'autant plus que les textes de la FAA prévoient la possibilité pour le ministre de faire convoquer une assemblée générale extraordinaire. Si cette situation perdure, nous n'aurons d'autre ressource que de suspendre la FAA et de priver de remarquables jeunes athlètes de toute possibilité de participer à des compétitions internationales. En espérant ne pas arriver à cette extrémité... » Le contenu de la lettre de Lamine Diack ne laisse planer aucun doute sur l'issue que l'IAAF réserve à la FAA, surtout à ses athlètes, appelés à participer aux compétitions internationales ici et ailleurs, si d'aventure Toufik Chaouche-Teyara, et ses collègues du bureau fédéral sont maintenus dans la situation imposée par la tutelle. Le 15 septembre 2006, le président de l'IAAF, Lamine Diack, fait parvenir un courrier au président de la FAA, Toufik Chaouche-Teyara dans lequel il écrit : « Etant donné que le ministre fonde l'opportunité et la légalité de sa décision sur les dispositions de l'article 100 de la loi algérienne 04-10 du 14 août 2004 sur l'éducation physique et le sport, je me suis fait le devoir de lui faire observer que, nonobstant les contraintes légales et réglementaires auxquelles elles peuvent être soumises au plan national, les fédérations, qui sont membres de l'IAAF, doivent s'obliger à fonctionner et à renouveler le mandat de leurs élus, dans le strict respect des statuts qu'elles auront déjà fait approuver par l'IAAF, dont les dispositions doivent bien évidemment être en totale conformité avec les principes généraux régissant l'affiliation des fédérations nationales. Il n'est donc pas acceptable qu'une mesure de suspension, ne découlant pas d'une délibération des instances régulières de la FAA, soit prise contre les membres élus de son bureau fédéral. Il est tout aussi inacceptable qu'une structure d'exception non élue puisse, en quelque manière, être investie de la mission de gérer l'athlétisme ou d'organiser des élections supposées être statutaires. Je me suis déjà attaché à adresser une correspondance au ministre afin de l'informer que le maintien de ses décisions donnerait immédiatement lieu à la suspension de la FAA avec, comme conséquence, l'impossibilité pour ses athlètes de prendre part aux activités organisées sous l'égide de l'IAAF... Notre objectif commun doit cependant être de favoriser exclusivement l'émergence d'une solution satisfaisante à cette crise, qui ne doit pas prendre des proportions préjudiciables aux intérêts de votre pays et surtout des merveilleux athlètes qui lui ont tant donné... » L'instance internationale de l'athlétisme, basée dans la principauté de Monaco, a pris fait et cause en faveur du président de la FAA, comme l'attestent ses deux correspondances citées ci-dessus. Face à cette prise de position tranchée de l'IAAF, le ministre de la Jeunesse et des Sports, Yahia Guidoum, ne tarde pas à réagir. Le 19 septembre 2006, il écrit à Lamine Diack : « Votre courrier (13 septembre) fait état de réserves de l'IAAF à l'égard des mesures conservatoires que j'ai dû prendre à l'encontre de la FAF, courrier qui réagit à la lecture d'un communiqué de presse au caractère généraliste émis sous le timbre de la cellule de communication du ministère et qui ne peut traiter du fond d'un dossier stigmatisant la dérive gestionnaire au passif des dirigeants de cette fédération... Les préalables à l'acte administratif de sanction sont prolixes et indiscutables tant ils identifient les vices de forme et de fond dans lesquelles s'est dévoyé le président de la FAA et de son bureau... Le MJS a constaté matériellement la démission de 5 membres du BF, suivi de celle d'un 6e membre suspendu aussitôt par le président suite à sa dénonciation de nombre de dépassements et anomalies dans le fonctionnement de la fédération... », suit une longue liste de griefs qui vont de « requêtes à déclarations alarmistes, en passant par le constat négatif dressé par la direction du sport d'élite, les conclusions négatives dressées par les soins d'une mission ad-hoc diligentée par l'inspection générale qui a mis en index nombre d'irrégularités d'ordre gestionnaire, l'endettement de la FAA insolvable, le rapport alarmant émanant du secrétaire général de la FAA ». La fédération ne reste pas en marge de cet échange épistolaire, puisqu'à son tour, elle saisit l'IAAF, le 19 septembre 2006, le même jour où le MJS transmet à l'IAAF la correspondance du ministre de la Jeunesse et des Sports. La Fédération algérienne d'athlétisme développe les mêmes arguments que ceux avancés par la tutelle en soulignant : « Nous (FAA) avons appris que Chaouche-Teyara a saisi l'IAAF pour vous informer de sa suspension. Cependant, nous demeurons convaincus qu'il ne vous a pas donné les détails qui ont conduit à son éviction réglementaire par la tutelle... » et énumère une douzaine de raisons qui, à ses yeux, justifient la suspension du président de la Fédération algérienne d'athlétisme. L'épilogue de cette affaire laissera des traces de part et d'autre.