Le tribunal de Rouiba a reporté le procès du directeur des ressources humaines de l'Agence nationale d'études et de suivi de la réalisation des investissements ferroviaires (Anesrif) poursuivi pour harcèlement sexuel à l'encontre de D. R., chargée du secrétariat de l'entreprise. L'affaire est reportée au 7 février, apprend-on auprès de l'avocat de la victime, rencontré hier au tribunal de Rouiba. La victime effondrée, une veuve de 51 ans, mère de deux enfants, place tous ses espoirs dans le système judiciaire pour lui rendre sa dignité. Elle confie que sa vie professionnelle a basculé le jour où elle a décidé de refuser de se soumettre à la loi du silence et de recourir à la justice pour la délivrer de son calvaire en dénonçant les avances malsaines d'un responsable de l'agence qui l'emploie depuis plus de 5 ans. Après le non-aboutissement de sa requête au niveau interne (elle l'avait déposée auprès de la direction générale), la victime a décidé de porter plainte pour dénoncer son harceleur. Les premières convocations devant la justice de toutes les parties concernées ont accentué la souffrance de cette employée qui, après le harcèlement sexuel auquel elle fait face, a dû s'armer de patience et de courage pour affronter le harcèlement moral qu'elle subit. «Aujourd'hui je suis hypertendue, je souffre de plusieurs maux dus au stress incessant et au mal-être que je vis», raconte-t-elle. Le refus de la victime de se plier à la loi du silence en subissant les avances malsaines de ce responsable est ainsi cher payé ; elle a été écartée de son groupe de travail sans aucune tâche professionnelle précise. «On a déplacé mon bureau, on ne me donne aucun travail et personne ne m'adresse plus la parole», explique notre interlocutrice en étouffant un sanglot qui trahit le désespoir dans lequel elle se trouve depuis presque une année. «Je résiste depuis des mois. Je suis blessée dans ma dignité et dans mon amour-propre. Je ne demande qu'à être réhabilitée dans ce droit au respect et à la dignité», dit-elle. Le réseau Wassila Avife, qui est une coalition de plusieurs associations accompagnant les femmes en détresse et les victimes de harcèlement sexuel et autres formes de violence, se mobilise autour de cette affaire. Le harcèlement sexuel qui touche de plus en plus de femmes actives reste encore tabou dans notre pays. Très peu de victimes osent porter une plainte vu les difficultés qui se dressent devant elles pour que justice leur soit rendue. Malgré les amendements apportés au code pénal et le durcissement des dispositions pour lutter contre les différentes formes de violence faites aux femmes, les victimes ont toujours du mal à déposer plainte. «Les travailleuses ont besoin de la protection de la loi, mais les victimes doivent être soutenues pour que les harceleurs soient dénoncés et condamnés. Le processus nécessite une mobilisation de toute la société civile, qui doit agir pour que la victime, déjà vulnérable, ne reste pas livrée à elle-même», lance Soumia Salhi, militante féministe et syndicaliste venue exprimer son soutien à la victime.