Le harcèlement sexuel dans le milieu du travail est une réalité en Algérie, mais le sujet demeure tabou. La question reste sensible dans notre société du fait que la personne harcelée peine à trouver des soutiens pour se défendre. Faire face à ce fléau est le travail de tout un chacun et la loi seule ne suffit pas, reconnaît Soumia Salhi, syndicaliste et militante féministe, hier, à Alger, lors d'une rencontre, qui avait pour thème les violences faites aux femmes, organisée par l'association Rachda. La syndicaliste insiste sur le fait que “bien que la législation soit essentielle, elle ne peut pas seule assurer un environnement professionnel sûr et sain pour les travailleuses". Pour Mme Salhi, lutter contre les violences exige des lois efficaces et surtout une bonne mise en application. “Nous ne le répéterons jamais assez, l'article 341 bis qui incrimine le harcèlement sexuel est une victoire pour les femmes, il est le résultat de nos luttes. Sur le plan symbolique, son existence signifie la condamnation du harceleur et la réhabilitation de la victime. Son importance pratique est également considérable. Il constitue un point d'appui précieux dans les pénibles procédures entreprises par les victimes", souligne la syndicaliste, précisant que des insuffisances sont relevées. “La pratique nous a conduites à réinterroger l'article 314 bis du code pénal pour revendiquer son amélioration. Ainsi, il est arrivé que des témoins qui ont eu le courage et le mérite de témoigner en faveur des victimes subissent des sanctions, qui vont jusqu'au licenciement. La protection des témoins est absolument nécessaire", dit-elle. Sur les lacunes que connaît la loi sur le harcèlement, l'intervenante fait savoir que “sans preuves ou témoins, la victime ne peut pas avoir recours à la justice. Mais aucun harceleur n'agit en public, ce qui fait qu'il est protégé par le secret. Par ailleurs, les témoins et la presse, qui donnent l'information, risquent des condamnations pour diffamation. Le harcèlement sexuel est un délit, le dénoncer ne devrait pas être puni. En condamnant les femmes qui osent dénoncer le harcèlement sexuel, la justice incite celles qui le subissent à garder le silence", poursuit la militante. Prouver un harcèlement sexuel est limite mission impossible. À cet effet, la syndicaliste propose que la loi prévoie, comme cela se fait ailleurs, un mode de preuve plus souple et plus favorable aux victimes. “La victime n'a pas à prouver l'existence de harcèlement sexuel, mais doit simplement établir des faits permettant de présumer de son existence", conclut-elle. D. S.