Le tribunal de Sidi M'hamed, près la cour d'Alger, a condamné hier les deux femmes qui se sont plaint de harcèlement sexuel, ainsi que le journaliste et le directeur du journal Djazaïr News, à une peine de deux mois de prison avec sursis assortie d'une amende de 40 000 DA et de 20 000 DA de dommages et intérêts. Les deux femmes condamnées ont été poursuivies par leur responsable hiérarchique, à la Banque d'Algérie (et non de la BNA comme rapporté dans notre précédent article), qui les accusait de diffamation pour avoir dénoncé le fait qu'elles faisaient l'objet de harcèlement sexuel sur leur lieu de travail. Après avoir été entendues par le tribunal à l'issue d'un débat qui a duré plus de trois heures, les prévenues et les deux journalistes ont maintenu leurs déclarations, estimant avoir osé briser le silence autour d'un fléau qui s'est installé au niveau de toutes les institutions publiques et privées du pays. Si le plaignant a demandé une somme en dédommagement d'un million de dinars pour chacun des prévenus, le ministère public a quant à lui requis 2 mois de prison avec sursis et une amende de 40 000 DA. L'affaire a suscité la solidarité des associations syndicales et féministes, alors que des pétitions de soutien ont été signées par des citoyens pour appeler l'Etat à rendre les textes plus fermes à l'égard des harceleurs et à encourager les victimes à briser le silence en témoignant devant les instances concernées. Dans un communiqué rendu public hier, le réseau Wasila, premier à réagir, a noté que « ce verdict va malheureusement avoir des conséquences dramatiques ». Il s'est alors demandé « qui demain va oser dénoncer cette atteinte intolérable à la dignité des femmes ? » Pour le réseau, « ces femmes ont osé rompre le silence, après avoir vainement cherché des soutiens dans leur entourage et auprès du syndicat de l'entreprise en s'adressant aux journaux, sans pour autant citer le nom de leur harceleur. Elles avaient décrit la situation et les conséquences désastreuses qu'elles vivaient et les brimades dont elles étaient les cibles depuis longtemps. Avant même qu'elles déposent plainte pour harcèlement sexuel et avant même la parution des articles, l'individu les a prises de vitesse et a déposé plainte pour diffamation. Alors que le procès avait montré combien ces victimes avaient eu du courage pour avoir osé parler, le verdict est tombé : elles sont coupables d'avoir parlé ». Ce qui est certain pour l'instant, c'est que les deux prévenues et les journalistes vont utiliser les voies de recours, en faisant appel.