Sabratha est depuis trois jours le théâtre d'opérations militaires contre Daech, qui a essayé de s'emparer des places fortes de la ville. Les milices locales, soutenues par celles des localités voisines d'Ezzaouia et Sormane, ont cerné les unités de Daech dans deux points de Sabratha. Le recul de Daech en Libye ne se limite pas à Benghazi et Ajdabia, dans l'Est libyen. Les informations en provenance de Sabratha, à mi-chemin entre Tripoli et la frontière tunisienne, indiquent que toutes les milices de la région se sont fédérées contre Daech. Les groupes armés relevant du Conseil de la choura des moudjahidine de Sabratha ont fait appel, mardi dernier, aux milices des villes voisines d'Ezzaouia et de Sormane pour chasser les forces de Daech qui ont essayé de s'emparer des bâtiments officiels de la ville, comme le commissariat de police et le siège de la mairie. Le jour-même, à Tripoli, les unités spéciales du ministère libyen de l'Intérieur ont mis la main sur un certain Mohamed Saâd Tajouri, envoyé de Syrte pour occuper le poste d'émir de Sabratha. Tajouri était accompagné de Salem Ammari, nommé pour sa part comme chargé des affaires administratives de Sabratha, rapporte le correspondant de l'agence dune-voices à Tripoli. «De tels agissements montrent clairement que Daech voulait s'emparer des villes comme Ajdabia ou Sabratha où l'EI coexistait avec les autres formations politiques. Les autres composantes de Fajr Libya ont contré rapidement Daech pour éviter de se retrouver acculées face à une situation désespérée, comme ce fut le cas pour Syrte», explique, à El Watan, le politologue libyen Ezzeddine Aguil. Visions expansionnistes de Daech Il s'affirme de plus en plus que l'attaque américaine contre Daech à Sabratha, à l'aube du vendredi 19 février, était une frappe préventive, pour éviter une opération d'envergure contre la Tunisie. Les premiers éléments de l'enquête suite à cette attaque indiquent que les milices présentes à Ksar Alelga (Sabratha) s'entraînaient pour une attaque imminente contre la ville de Ben Guerdane au Sud tunisien. «200 moudjahidine vont attaquer la ville de Ben Guerdane. Ils seront soutenus par des pick-up lourdement armés et vont être ralliés par plus de 1000 sympathisants, implantés dans le Sud tunisien», reconnaît un blessé tunisien, survivant de l'attaque de Sabratha, sur le site électronique des forces spéciales du ministère libyen de l'Intérieur. «Si on recoupe ces informations avec les récents incidents survenus au Sud tunisien dans la région de Matmata, qui a vu la découverte dans les monts de Toujane, le 1er février, d'une cellule terroriste, qui voulait y installer un maquis, il n'y a qu'un pas pour conclure que Daech regroupe ses forces et que les Américains, qui ont vu venir, ont coupé court à ce stratagème diabolique», estime M. Aguil. Il est utile de rappeler que les montagnes du Sud-Est tunisien sont connues pour leurs sentiers difficiles et leurs grottes utilisées par les fellaghas, lors de la lutte contre le colonialisme français. A signaler que trois terroristes avaient été abattus slors de cette opération qui s'est étalée sur trois jours. Un terroriste blessé est entre les mains de la brigade antiterroriste. C'était la première fois que des activités terroristes ont été découverts sur ces montagnes. Les maquis en Tunisie se trouvent sur les montagnes des régions du Kef (Ouergha) et Kasserine (Chaâmbi). Il y a eu des tentatives pour s'implanter sur Jebel Orbat (Gafsa) et dernièrement Matmata. «La lutte contre Daech ne sera pas facile vu, d'une part, le nombre élevé de jeunes que l'EI a embrigadés à travers le monde et, d'autre part, les fonds disponibles, l'immense étendue géographique de la Libye et la quantité faramineuse d'armes dont disposent ces fous de Dieu», constate sceptiquement l'expert sécuritaire Ali Zermedini.