L'attaque annoncée de Daech à Ben Guerdane, près de la frontière libyenne, a eu lieu hier. Elle a été perpétrée par des terroristes, originaires pour la plupart de la ville. Les forces armées et autres services de sécurité tunisiens contrôlent la situation. Le bilan très lourd près de 35 terroristes abattus et 18 martyrs — traduit l'importance des préparatifs terroristes pour s'emparer de cette ville frontalière. Le recoupement des informations en provenance de Ben Guerdane laisse entendre que le mot d'ordre des terroristes était de se rencontrer à la grande mosquée de la ville, lors de la prière de l'aube, pour coordonner l'attaque. Les citoyens, joints par téléphone, disent que «la voix de l'appel à la prière, hier, n'était pas celle à laquelle nous étions habitués». Tout de suite après, les terroristes se seraient répartis en groupes et seraient allés abattre sept sécuritaires chez eux. Il s'agit du chef de la brigade antiterroriste de Ben Guerdane, de trois éléments de cette brigade, d'un agent de la Garde nationale, d'un agent de police et deux agents de la circulation. Ensuite, des dizaines de terroristes se sont attaqués à la caserne militaire, située en plein centre-ville de Ben Guerdane. Le commissariat de police, la direction de la Garde nationale et la Douane ont été, quant à eux, attaqués, chacun par un petit groupe de terroristes. Mais si l'on en juge par les pertes humaines et les dégâts matériels, il est clair que les terroristes ne sont parvenus à s'emparer d'aucun des symboles de l'autorité. L'armée et les forces sécuritaires ont réagi efficacement et maîtrisé les groupes des assaillants. Les services de sécurité ont poursuivi les terroristes dans leur repli. Des avions militaires ont servi dans la poursuite des terroristes qui ont essayé de s'enfuir vers Tataouine. Dix terroristes se sont caché dans la maison de l'un d'eux, Adel Ghandri, déjà fiché par le ministère de l'Intérieur. L'armée a fait sauter cette maison. Le bilan annoncé par le ministre de la Défense, Ferhat Horchani, parle de 35 terroristes abattus, de 18 martyrs (entre civils et éléments des services de sécurité), 5 blessés parmi les soldats, 5 autres parmi les éléments des autres services de sécurité et trois civils. Sept terroristes ont été arrêtés. Mesures et réactions Dès le début de cette opération, les autorités sécuritaires ont fermé les accès au village de Ben Guerdane. L'île de Djerba a été isolée. Le couvre-feu a été annoncé dans la région à partir de 19h et ce jusqu'à 5h30. La frontière avec la Libye a été fermée, aussi bien à Ras Jedir (5 km de Ben Guerdane) qu'à Dhehiba. Seuls les citoyens des deux pays peuvent rentrer chez eux. Le président Beji Caïd Essebsi a décidé de fermer les frontières. «Une mesure préventive que la Tunisie ne peut plus éviter, malgré toute la bonne volonté que nous avons pour soutenir nos voisins», a-t-il dit sur les ondes de Radio Tataouine. Les citoyens de la région ont fait preuve de beaucoup de bravoure, en faisant des files pour le don du sang à l'intention des blessés de cette attaque. Une manifestation a été, par ailleurs, organisée par la société civile, la veille à Ben Guerdane. Elle exprimait le rejet des citoyens de la ville à la dernière infiltration armée de Libye, qui s'est soldée par la mise hors d'état de nuire de cinq terroristes, il y a quelques jours. Plan terroriste Ce plan de s'emparer de la ville de Ben Guerdane par Daech a été planifié, semble-t-il, depuis des mois. L'attaque opérée par les Américains, le 19 février dernier à Sabratha, aurait eu comme objectif de prévenir cette attaque. La cinquantaine de terroristes, tués à Sabratha, est majoritairement formée de Tunisiens. Les blessés de Sabratha ont parlé de cette attaque et fait référence à l'existence de cellules dormantes à Ben Guerdane. La phase suivante était l'infiltration de jeudi dernier, près de Ben Guerdane, qui s'est soldée par cinq terroristes tués. Les forces sécuritaires tunisiennes avaient alors parlé de deux autres voitures dont les occupants n'ont pas été retrouvés. Ils seraient, selon l'expert militaire, Ali Zermedini, en phase de ravitaillement militaire des terroristes de Ben Guerdane. Selon le militant de la société civile de la région, Mustapha Abdelkebir, la zone de Ben Guerdane est largement infiltrée par les terroristes de Daech, qui sont en étroite connexion avec les contrebandiers. «Ce n'est donc pas par hasard que les terroristes de Daech ont visé la ville de Ben Guerdane», a-t-il affirmé, en lançant un appel à l'éveil stratégique contre de pareilles activités. A mentionner que deux grandes caches d'armes ont été découvertes à Ben Guerdane, où étaient entreposés des Doushka, des RPG et fusils à canons légers. L'armée tunisienne les a sécurisées. Mais, le recensement sera fait ultérieurement. Ces armes ont été retrouvées chez un contrebandier, spécialiste également dans le commerce de dattes.