Aguemoun Izem, un village de la Haute Kabylie, est situé dans une immense zone boisée comprise entre Larbaâ Nath Irathen et Aïn El Hammam. Durant des années, les embuscades terroristes étaient très fréquentes et la peur régnait en maître des lieux. Ayant déjà subi les dommages de la colonisation, les villageois subissaient le diktat des hommes armés. Ne se sentant plus en sécurité, la population a déserté en masse les lieux et vers la fin des années 1990, ce fut un village fantôme. Mais depuis quelques mois, l'amorce d'un retour se fait de manière significative. Des portes et des fenêtres, fermées depuis longtemps, commencent à s'ouvrir. La lumière entre enfin dans ces maisons ensevelies jusque-là sous une chape d'obscurité et de silence. « Quinze familles sont déjà revenues définitivement », nous dit un jeune villageois, conducteur de fourgon de son état. « Certaines font des allers et retours, dans l'indécision ; d'autres familles viennent les week-end seulement, parce que déjà installées ailleurs. Il y a jusqu'a 300 personnes les fins de semaine ». Signe patent de cette renaissance, les vergers de figuiers et les treilles sont visiblement entretenus et les gazouillements d'enfants commencent à recréer une gaieté longtemps oubliée. Il n'y a pourtant pas de contrainte logistique insurmontable s'opposant au retour. Le village est connecté au réseau électrique et l'eau potable est disponible. Il possède aussi des sources traditionnelles épargnées par la pollution. Les habitants voudraient que l'éclairage public fonctionne. Les ruelles aussi nécessitent un bétonnage et certaines parcelles doivent être désenclavées. Quelques efforts doivent donc être consentis par les autorités pour permettre à ce hameau séculaire de revivre et à de nombreuses familles de revenir sur la terre de leurs ancêtres, même si certaines, ayant construit une vie ailleurs, auront du mal à se réinstaller.