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«Le Front populaire ne propose pas de remettre en cause la société coloniale»
Claire Marynower*. historienne
Publié dans El Watan le 31 - 05 - 2016

Le Front populaire, au risque d'une vision anachronique, peut-il être vu comme un échec de changer les choses en Algérie et donc un moment annonciateur de ce qui va advenir jusqu'au déclenchement de la guerre d'indépendance ?
Il faut faire attention avec ce genre de discours car le Front populaire et, en particulier le projet Blum-Violette, est devenu un élément fondateur de ce qu'il est convenu d'appeler le discours des occasions manquées, cette idée que si «en 36 on avait fait… cela ne se serait pas passé ainsi… que le 8-Mai 45 ne serait pas arrivé, ni le 1er Novembre 54, qu'on aurait évité la guerre…». Cette idée des occasions manquées a beaucoup été portée par des historiens français, et en premier par Charles-André Julien, qui, à la base, était un militant socialiste, élu conseiller général d'Oran en 1919.
C'est par lui que ce discours est venu, et moi je m'en méfie un peu parce que ce sont des acteurs qui l'ont fait entrer dans le récit par leurs élèves et successeurs. On peut malgré tout effectivement se poser la question de savoir si les choses auraient pu être différentes.

Ne peut-on se demander pourquoi cette espèce de chaudron revendicatif en Algérie, lié au Front populaire, n'a abouti à rien ?
Lorsque j'ai travaillé sur les socialistes durant la guerre de libération, je me suis étonnée qu'ils n'arrêtent pas d'évoquer les années 30'. Ils étaient nostalgiques de cette époque-là où ils ont cru que quelque chose était possible, que la situation pouvait bouger, que la société algérienne pouvait devenir plus égalitaire. En regardant structurellement, en tant qu'historienne, la société d'alors, elle ne le pouvait pas. Comment donner le droit de vote à tous, comme le souhaitait Messali Hadj, créer un parlement algérien avec tous les éléments de la population dont la part algérienne aurait été majoritaire ? Ça, c'est anticolonialiste mais cela aurait remis en cause la société coloniale. Ce n'est pas ce que propose le Front populaire.

N'y avait-il pas des forces en Algérie qui s'y opposaient ? Quels étaient ces blocages ?
C'est compliqué. On dit que c'est la faute des pieds-noirs, même si je n'emploie jamais ce terme qui n'existait pas dans les années 30'. La plupart du temps on parle de la réaction «algérienne», parlant des Français d'Algérie. Ce message-là encore provient des socialistes qui disent que c'est la faute de l'administration infiltrée par la réaction. En fait, la République ne se donne jamais les moyens de l'assimilation qu'elle prône par ailleurs.
Effectivement, il y a la fédération des maires d'Algérie qui est vent-debout contre le projet Blum-Violette qui n'est pourtant pas révolutionnaire car il voulait seulement la citoyenneté à une poignée d'«évolués». Tout projet de réforme est empêché par la majorité électorale en Algérie dont font partie les radicaux. La République qui énonce que l'Algérie c'est la France n'applique jamais les lois valables en métropole sans passer par des décrets. Ce qui fait que l'Algérie est gouvernée par dérogation. L'exemple le plus frappant est celui de la loi de séparation de l'Eglise et de l'Etat de 1905, dont les décrets feront que l'Etat continuera de gérer le culte musulman et les biens habous.

Il y a donc bien un hiatus entre les militants socialistes et le gouvernement Blum...
Oui, entre le gouvernement et les fédérations, entre les fédérations algériennes socialistes et les directions métropolitaines beaucoup moins intéressées par les questions algériennes et à l'intérieur du Front populaire, entre les socialistes, les radicaux et les communistes qui changent de stratégie pour s'allier avec leurs partenaires dans le Front populaire en délaissant le mot d'ordre d'indépendance de l'Algérie, même s'ils continuent de porter des revendications plus radicales. Malgré le coup de force des socialistes algériens qui font passer un texte au congrès de la SFIO à Paris en 1936, ambitieux, vague et inapplicable en l'état, la joie que la gauche arrive au pouvoir passe au premier plan. L'Algérie est lointaine, devenant le cadet des soucis du gouvernement Blum.
Peut-on résumer ces années de 1936 à 1939 à un grand bouillonnement culturel, politique et médiatique ?
La vie politique algérienne a commencé avant avec un frémissement dans les années 20' et elle se développe avec le centenaire de la colonisation en 1930, fêté comme si l'Algérie n'avait pas existé avant.
Ce côté très scandaleux précipite une prise de conscience grandissante et dans les années 1933-34 il y a une massification de la politisation des Algériens avec des événements comme la braderie de Tlemcen, les émeutes de Constantine. Le Front populaire est devancé par cette ébullition politique en Algérie.
Les deux phénomènes sont convergents mais vite déçus avec l'interdiction de l'Etoile nord-africaine en 1937.
En quelques mois, on se rend compte que le gouvernement n'est pas anticolonialiste. Mais si le Front populaire peut en être un moteur, c'est par son échec. Les militants vont s'appuyer sur le fait qu'il y a une impasse politique. Et même si après la Guerre mondiale le code de l'indigénat est aboli et que les Algériens ont plus de droit civiques, plus que proposait Blum-Violette, ce sera comme si c'était trop tard. Le Front populaire aura servi à ça, c'est que les mesures de type réformiste ne suffisent pas. 
* Claire Marynower est maître de conférences en histoire à Sciences Po Grenoble. Elle a soutenu en 2013 une thèse intitulée «Etre socialiste dans l'Algérie coloniale.
Pratiques, cultures et identités d'un milieu partisan dans le département d'Oran, 1919-1939», dont elle prépare une édition aux Presses universitaires de France.


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