Le 30e anniversaire du Registre du cancer de Sétif a été rehaussé par la présence de bon nombre d'experts algériens et étrangers, notamment français, très impliqués dans la lutte contre le cancer. Siégeant tous les dix ans, le 3e Forum international, réuni hier et aujourd'hui à l'auditorium K.Naït Belkacem de l'université Ferhat Mekki Abbas, dans la capitale des Hauts- Plateaux, a abordé toutes les questions liées à cette transition épidémiologique, et posé toute la problématique et les questionnements sur ce problème de santé publique, qui constitue un véritable fardeau social et économique. D'emblée, le professeur Hamdi Cherif fait parler les données : «Lors de la rencontre de 2004, on a alerté les pouvoirs publics sur la nécessité de développements structurels et stratégiques pour la prise en charge du cancer. Ce 3e forum est l'occasion idoine pour débattre de cette approche globale du plan stratégique quinquennal 2014-18 de lutte intégrée contre les facteurs de risque des maladies chroniques non transmissibles et sortir avec une déclaration commune : ‘‘Normaliser le cancer et dénormaliser les facteurs de risque''.» Considéré par ses pairs comme le père de la cancérologie en Algérie, le Pr Abdelkrim Allouache donne, à travers son exposé, un véritable cours magistral: «A cause du changement du mode de vie, les facteurs de risque on augmenté en Algérie. L'incidence du cancer augmente d'une manière remarquable avec des organes plus touchés que d'autres. Chez la femme, le cancer du sein augmente, alors que celui du col de l'utérus diminue. La consommation de tabac est à l'origine de la flambée du cancer du poumon et de la vessie chez l'homme. Par contre les cancers du cavum et de l'estomac régressent, car la chaîne de froid (réfrigérateur) est présente dans presque la totalité des foyers algériens consommant de moins en moins de salaisons. L'électrification et le raccordement des foyers en gaz naturel est l'autre cause de la dimunition des cancers du cavum», souligne le professeur Allouache, qui enchaîne : «L'une des causes du cancer du sein chez nous relève de la contraception orale 1re et 2e génération (pilule non adaptée). Avec un taux de 40% de cancers du sein en Algérie, on doit relever trois défis importants. On doit savoir qu'en 2035, le cancer du sein atteindra le taux de 65%. Pour lutter efficacement contre cette pathologie, il faut des structures, un diagnostic précoce et le dépistage de toutes les lésions. On doit par ailleurs identifier les facteurs de risque responsables de cet accroissement du cancer du sein et pouvoir agir sur eux pour éventuellement réduire leur influence et réfléchir, puis développer, les traitements préventifs.» La professeure Helene Sancho Garnier (institut du cancer de Montpellier), insiste sur la prévention : «Si on arrive à diagnostiquer rapidement le cancer du sein, on le guérit. Pour cela, les sages-femmes, les généralistes, ainsi que les gynécologues doivent savoir palper le sein afin de trouver des petites tumeurs qui sont guérissables. Des mammographies systématiques tous les 2 ans, qu'on doit réaliser dans des conditions adéquates (un mammographe spécialiste et un radiologue en mesure d'interpréter les résultats) sont exigées ainsi que le suivi régulier. Toute image positive doit est suivie par des examens complémentaires (radiographie et biopsie). On doit par ailleurs aller vers une contraception adaptée à la personne et diversifiée dans le temps. Ce mode de contraception a donné de bon résultats en Tunisie...»