Dans le cadre des rencontres organisées par la maison d'édition Chiheb, l'écrivain Rachid Mokhtari a présenté, mardi soir, son dernier livre intitulé Le nouveau souffle du roman algérien, essai sur la littérature des années 2000. Ce nouveau livre est le prolongement de son dernier ouvrage : La graphie de l'horreur. Dans son livre, Rachid Mokhtari donne la parole à certains écrivains qui ont immergé la scène littéraire depuis 2000. De ce fait, il a choisi délibérément des auteurs qui produisent et qui vivent en Algérie. Les écrivains installés en Algérie n'ont pas le même rapport de langue que ceux qui vivent à l'étranger. Les plumes des années 2000, dit-il, sont des jeunes qui n'ont pas un seul style. Les écrivains sont des acteurs et des observateurs de certaines turbulences sociales. « Ce sont de nouveaux auteurs qui ne sont pas représentatifs d'une idéologie politique. Les préoccupations esthétiques de ces écrivains sont plus grandes que leurs préoccupations thématiques. » Jusqu'aux années 1970, la littérature utilisait des clivages linguistiques. Aujourd'hui, cela n'est pas opérationnel dans la critique littéraire. Il y a un phénomène de bilinguisme dans la littérature. Les fondateurs du roman maghrébin moderne utilisent un « je » d'affirmation, convoquant indéniablement l'histoire. Après 1962, certains écrivains, dont Rachid Boudjedra, se sont imprégnés d'un « je » qui se remet en question. C'est du moins ce qu'à affirmé le conférencier. Le « je » de la nouvelle génération se déconstruit en ne se nourrissant pas de l'histoire et de l'idéologie. Les écrivains en herbe ne revendiquent plus ce « je ». Leur rapport au roman n'est pas une quête identitaire. A la question de savoir s'il y a un renouveau au niveau de l'écriture, Rachid Moktari affirme que chaque génération d'écrivains ne doit pas être dissociée de son paradigme socio-historique. Se considérant comme un anthropologue de la littérature, Rachid Moktari constate que les lecteurs sont déroutés par la manière d'écrire de cette nouvelle vague d'écrivains. Leurs écrits font sourire aux éclats, prouvant que la littérature est en bonne santé, malgré un contexte où la tragédie est toujours présente. L'auteur a tenu à signaler qu'il ne croit pas à la littérature universelle mais à celle des spécificités. Ils sont beaucoup plus producteurs d'émotion que d'idées : « Ils creusent leur verbe dans les charniers, recherchent un mode d'écriture qui se joue de la censure jusqu'à tremper leur plume dans les charniers oubliés. » Nous reviendrons plus longuement sur cette importante contribution à l'analyse du roman algérien actuel.