- Votre entreprise est spécialisée dans l'élimination des déchets dangereux dont les PCB, un projet que vous avez entamé depuis 2004 en Algérie. Où en êtes-vous aujourd'hui ? Nous avons mené plusieurs opérations, notamment avec Sonatrach, des banques, plusieurs administrations publiques et sociétés algériennes, plutôt publiques que privées. Concrètement, nous prenons en charge les déchets spéciaux dangereux, dont les PCB, l'amiante, le mercure et bien d'autres produits, depuis la collecte jusqu'à leur élimination dans des centres de traitement agréés. L'élimination se passe généralement en Europe, car il n'existe pas de centre agréé pour ce type de déchets en Algérie. Selon les chiffres communiqués par les autorités compétentes, on compte 3500 tonnes d'huiles PCB provenant d'environ 6700 transformateurs. Mais peu de PCB ont été évacués et éliminés à ce jour ! Nous concernant, nous n'avons transféré et éliminé que quelques centaines de tonnes de PCB depuis l'Algérie. - Les personnes que nous avons rencontrées à Laghouat disent être contaminés par les PCB qui leur ont causé, selon eux, des maladies comme le cancer et entraîné d'autres pathologies. Les PCB sont-ils réellement dangereux ? Les PCB ont été utilisés, pendant plusieurs années, pour leurs qualités diélectriques comme isolants résistant au feu, principalement pour réduire les risques d'incendie. Polluants organiques persistants (POP), ils ont été interdits depuis 1986, car ils sont très peu biodégradables et peuvent s'accumuler dans différents milieux. Ils peuvent facilement contaminer les eaux de surface, les nappes phréatiques, les sols et tout organisme vivant, entraînant des effets nocifs pour la santé de l'homme. L'alimentation est la première source d'exposition aux PCB, soit 90% de l'exposition totale. Les produits d'origine animale en sont les premiers vecteurs de transmission : poisson, viande, œufs, produits laitiers. Les PCB font partie des contaminants bioaccumulables fréquemment trouvés dans les tissus gras chez l'humain, notamment le lait maternel. Concernant la dangerosité des PCB, en 2013 sur la base d'indications suffisantes de cancérogénicité chez l'homme et chez l'animal, le Centre international de recherche sur le cancer (CRIC), a classé les PCB comme cancérogènes pour l'homme (groupe 1). De plus, les PCB de type dioxine ont aussi été classés dans le groupe 1 sur la base de fortes indications d'un mécanisme de cancérogénèse. En France, la pollution du Rhône par les PCB a entraîné l'interdiction de la consommation des poissons pêchés. Il y a aussi le cas des députés européens dont les tests ont prouvé la présence des PCB dans le sang de certains d'entre eux. Maintenant, je ne peux pas me prononcer sur le cas de ces personnes, car je ne suis pas compétent en la matière, seul un épidémiologiste pourrait le faire. - Quelles sont les consignes de sécurité et de prévention données à vos travailleurs ? Nos techniciens sont formés préalablement à leur intervention sur sites, aux risques que représentent les PCB pour eux et pour l'environnement. Les interventions de notre personnel sont soumises à des procédures strictes, particulièrement pour les opérations de vidange, d'empotage et de conditionnement des PCB. Ces procédures répondent aux normes internationales de sécurité pour la gestion des déchets PCB. Nous veillons tout particulièrement au port obligatoire d'équipement de protection individuelle (EPI) spécifique pour la manipulation ou le contact avec les PCB. Tous les EPI et le matériel souillé aux PCB utilisé pendant le chantier sont éliminés avec l'ensemble des déchets à traiter. Notre mission est de respecter les règles de la Convention de Bâle pour les mouvements transfrontières des déchets, de la Convention de Stockholm pour l'élimination des POP, les règles du transport routier national et international des matières dangereuses, des règles de l'IMDG pour le transport maritime des produits dangereux et de la protection de l'environnement. Maintenant, il est de la responsabilité de chaque détenteur de mettre en œuvre une politique d'élimination de leurs déchets spéciaux dangereux comme les PCB afin d'éviter tous risques de pollution et de contamination de leurs employés et des citoyens, et ce, sur l'ensemble du territoire algérien.