Le développement induit par l'homme et son mode de vie s'est fait, de tout temps, aux dépens de l'environnement. Au début du XXe siècle, le monde a vu poindre un phénomène nouveau, celui de l'édification des méga-cités et des industries titanesques affectant terriblement l'environnement et les dégâts qui en ont résulté semblent irrémédiables. Aujourd'hui, les polluants organiques persistants et les déchets dangereux, causes majeures de la pollution de la planète, ont mobilisé la communauté internationale afin d'y remédier. L'Algérie n'est pas restée insensible à ce combat vital. Les polluants organiques persistants (Pops) comptent parmi les produits les plus dangereux rejetés chaque année par l'homme et affectent périlleusement l'environnement. Ces polluants ont, en plus, la particularité d'être persistants. «Plus ils restent dans l'environnement, plus ils se concentrent. On appelle cela la bioaccumulation», explique Faïza Dahlab, directrice et experte au centre national des technologies de la production plus propre (CNTPP). Ces Pops peuvent détériorer considérablement l'état de l'environnement, car selon Mme Dahlab, la chaîne alimentaire est fortement contaminée par la pollution industrielle. «Les poissons, par exemple, qui vivent dans une eau contaminée, absorbent la toxicité qui sera immédiatement transmise à l'homme. Donc, il faut dire que la répercussion la plus dramatique est sur la chaîne alimentaire. Je dois dire que cela devient un problème de santé publique», déplore-t-elle. En 2009, 12 produits organiques persistants ont été proscrits à la production et à l'utilisation. «Force est de rappeler que ces produits étaient interdits par la convention de Stockhlom. Et c'est une infraction à la loi que de continuer de produire des pops interdits par ladite convention, à laquelle l'Algérie a vigoureusement adhéré en reconnaissant la nocivité des polluants sur l'environnement et la vie des êtres vivants», déclare l'experte. Pour constater le respect de la convention, le CNTPP travaille en collaboration avec le centre national de toxicologie pour déterminer les pops présents dans les produits alimentaires — via les pesticides largement importés —, «ce qui nous aide à éviter l'intoxication de la chaîne alimentaire». Par ailleurs, des dioxines générées par l'incinération sont retrouvées dans l'air. «Il convient de souligner à titre d'exemple une usine de ciment. Si le ciment ne passe pas au four à une température de 900° en deux secondes, une grande quantité de dioxine sera libérée dans l'air, sachant que ces substances sont à l'origine de diverses maladies telles que le cancer, les troubles neuro-comportementaux et les malformations congénitales.». L'industriel face à la pollution S'agissant de la pollution industrielle, l'experte assure que l'Algérie ne détient aucune installation pouvant traiter ses déchets. «Imaginez une entreprise qui stocke des déchets sui pèsent plusieurs tonnes. La réglementation exige de l'industriel de stocker ses produits en attendant qu'il trouve lui-même une solution. On part donc du principe qui veut que celui qui produit des déchets industriels est le responsable direct de la pollution qu'il provoque à l'environnement et c'est à lui de s'occuper de son élimination. C'est en effet un moyen d'inciter les industriels à se diriger vers des process et des technologies industriels propres.» Cette démarche favorise l'érection d'une technologie propre, qui est un process industriel où on produit le minimum de déchets possibles. Mme Dahlab déplore que l'Algérie ne possède pas encore ces technologies, «mais on a mis des mécanismes pour pousser les industriels à adopter ce système», ajoute-t-elle. Respecter la réglementation Le CNTPP est sous la tutelle du ministère de l'Aménagement du territoire et de l'Environnement. «On agit à l'échelle nationale dans la gestion de l'environnement industriel. On s'adresse aux entreprises exerçant dans le domaine de l'industrie qui sont essentiellement des agents polluants. Notre mission est de conseiller et d'aider les entreprises à se mettre en conformité avec la réglementation environnementale qui concerne les activités industrielles», indique-t-elle. Compte tenu de leur diversité et leur capacité de production, les entreprises sont désormais hiérarchisées sous le nom de «établissements classés». Ainsi, leurs activités industrielles sont concernées par la réglementation applicable pour la protection de l'environnement. Par ailleurs, le centre est agréé pour réaliser des études au sujet des activités industrielles. «Chaque entreprise doit détenir une autorisation du ministère de l'Environnement pour l'ouverture d'une usine ou une activité quelconque. Ainsi donc, l'industriel doit prouver au ministère que son projet n'aura effectivement aucun impact négatif sur l'environnement», souligne l'experte. En outre, le CNTPP classe les activités industrielles en 3 catégories selon la quantité de la production de l'entreprise : catégorie 1 : une nouvelle activité sous l'autorité du ministère de l'Environnement qui a une capacité de production industrielle assez importante par rapport à la quantité des produits chimiques utilisés, ainsi que les équipements électriques. Celle-ci devra établir une étude d'impact sur l'environnement et une autre sur le danger de la contamination afin de mesurer l'ampleur de la pollution émanant de l'établissement. Catégorie 2 : une nouvelle activité industrielle qui exige une autorisation du wali. Elle est classée ainsi en fonction de sa capacité de production qui est moins considérable en comparaison avec la première catégorie. Pour ce qui est de la catégorie 3, cette dernière concerne exclusivement les établissements industriels déjà en activité. En effet, la réglementation environnementale exige de ces établissements de réaliser un audit environnemental et une étude de danger. C'est-à-dire effectuer un bilan pour mesurer le degré de pollution générée par l'établissement en question. C'est un moyen qui consiste en une évaluation systématique et objective des activités de l'entreprise. Les experts proposeront au final des mesures à prendre afin de parvenir au contrôle, à la réduction, voire à l'élimination des risques. Mais également de déterminer le coût de l'investissement afin de remédier à la pollution. «Hélas, ce ne sont pas toutes les entreprises qui sont à l'écoute de la réglementation. Il y a bien celles qui ignorent les documents ou bien ne les comprennent pas», regrette-t-elle, en ajoutant qu'à partir du 28 juin 2005, le ministère de l'Environnement exige l'intégration de délégués pour l'environnement dont la mission est d'informer, sensibiliser, conseiller et communiquer sur les questions relatives aux effets générés sur l'environnement par l'activité de l'entreprise.